Le président américain, vedette de l'édition 2018, a renoncé pour cause de "shutdown" à revenir dans la station de ski huppée des Alpes suisses, où convergeront à partir de lundi les jets, hélicoptères et limousines d'environ 3.000 PDG et responsables politiques.
Jeudi, il a également annulé la venue de l'imposante délégation qui était censée porter son programme "Make America Great Again".
La Première ministre britannique Theresa May a annulé in extremis sa participation pour se consacrer au Brexit - sujet majeur pour les grands patrons attendus pendant une semaine dans les hôtels feutrés et salles de conférence ultra-sécurisées de Davos. Ils redoutent un divorce à la hussarde entre Royaume-Uni et Union européenne le 29 mars.
Le président français, l'un des chouchous de Davos l'an dernier, ne refait pas le voyage pour cause d'agenda "surchargé".
"Brésil différent"
Il était devenu difficile d'imaginer sa venue devant ce parterre de grandes fortunes et de puissants entrepreneurs, alors que la France est secouée par la fronde sociale des "gilets jaunes", qui reprochent à Emmanuel Macron d'être le "président des riches".
Il n'y aura donc personne ou presque pour voler la vedette à Jair Bolsonaro, lequel entend promouvoir "un Brésil différent, libre de toute attache idéologique et de la corruption généralisée".
Par certains aspects, le président populiste et climato-sceptique pourrait passer pour un trublion. Il fera face en effet à une assemblée acquise à la cause du libre-échange, et dont la principale préoccupation est le changement climatique, synonyme de désastres humains mais aussi de coûteuses complications économiques, selon une enquête réalisée par les organisateurs.
"Le parcours de Bolsonaro ne le destine pas à être un fervent adepte du mantra de coopération transnationale du Forum économique mondial", le nom officiel du rassemblement, constate Douglas Rediker, président du International Capital Strategies à Washington.
Mais le grand patronat réuni à Davos, où le programme officiel de débats se double d'une intense activité mondaine, propice aux négociations d'affaires fructueuses, a aussi des raisons d'être bien disposé.
Jair Bolsonaro a en effet désigné comme ministre de l'Economie un chantre de l'ultra-libéralisme, formé aux Etats-Unis: Paulo Guedes. Et la Bourse de Sao Paulo a salué l'entrée en fonction du nouvel exécutif avec un record historique, le 2 janvier dernier.
Après tout, l'an dernier, Davos avait finalement fait bon accueil à Donald Trump, pourtant annoncé comme l'éléphant protectionniste dans le magasin de porcelaine du multilatéralisme.
"Gagnants et perdants"
La désaffection des responsables politiques américains et européens - à l'exception d'Angela Merkel, en plein retrait politique - laissera aussi le champ libre à une importante présence chinoise.
La Chine sera certainement un sujet de discussions à Davos, où le ralentissement en cours de la deuxième économie mondiale suscite bien des inquiétudes, tout comme ses ambitions de conquête de marchés internationaux, le fameux programme des "Nouvelles routes de la soie".
Le Fonds monétaire international donnera comme d'habitude la température de la conjoncture mondiale lundi, en lever de rideau du Forum, tandis que l'ONG Oxfam fournira un non moins traditionnel contrepoint avec son baromètre annuel des inégalités, toujours très suivi.
"La mondialisation produit des gagnants et des perdants. Désormais nous devons nous occuper des perdants, de ceux laissés-pour-compte", estime l'emblématique fondateur du Forum économique mondial, Klaus Schwab.
Ce discours ne convainc guère les opposants de cette grand-messe du libéralisme économique, dont certains ont eu l'autorisation de manifester jeudi dans un village transformé en camp retranché, avec déploiement de militaires suisses et espace aérien étroitement contrôlé.
"C'est très bien que des hommes d'affaires fassent des affaires" mais "je n'aime pas cette notion de sous-traiter l'amélioration du monde" à l'élite financière et économique réunie dans les Alpes suisses, assène Anand Giridharadas, auteur de "Winners Take All: The Elite Charade of Changing the World".
"En ces temps de colère", la seule solution selon lui serait, purement et simplement, d'"annuler Davos".
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