Le titre de son livre "Moi, Valentina, née par GPA" (ed. Michalon), à paraître jeudi, est trompeur: "C'est même l'une des dernières choses que j'utiliserais pour me qualifier", écrit-elle.
Elle et sa jumelle Fiorella, nées d'une mère porteuse le 25 octobre 2000 en Californie, où ce procédé interdit en France est légal, sont cependant devenues le symbole de ces enfants que la justice française refuse de reconnaître à l'état civil.
Leurs parents, Sylvie et Dominique, qui ne sont reconnus comme père et mère que sur les seuls actes de naissance californiens, mènent depuis dix-huit ans un combat tous azimuts devant les tribunaux pour obtenir gain de cause. Dernier épisode de leur marathon judiciaire: en octobre, la Cour de cassation a sollicité l'avis de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avant de se prononcer.
Après leur témoignage paru en 2008 ("Interdits d'enfants", Ed. Michalon), ils ont cette fois confié la plume à l'une de leurs filles, qu'ils laissent de plus en plus prendre la lumière médiatique ces dernières années.
"Le but du livre, c'est de rétablir la vérité, explique à l'AFP Valentina. On n'entend jamais les enfants vraiment concernés dire ce qu'ils pensent, ce qu'ils ressentent, on parle toujours pour eux, on dit qu'ils se sentent mal, qu'ils ont des problèmes..."
La jeune bachelière avec mention, qui poursuit des études d'économie à Londres, s'est "toujours sentie normale". "Je suis la preuve vivante" que les enfants nés de GPA "sont loin d'être des traumatisés", dit-elle.
"Comme tout le monde, j'ai mes questions existentielles, mais pas parce que je suis née dans un autre ventre que celui de ma mère".
"Ma gestatrice, rien d'autre"
Cet autre ventre, c'est celui de Mary, une mère de famille américaine de quatre enfants, qui a accouché des jumelles Mennesson à San Diego. Valentina et Fiorella la revoient régulièrement, en France ou à Orlando (Floride) où elle a déménagé.
"Pour moi, c'est ma gestatrice et rien d'autre", insiste Valentina. Elle récuse le terme de "mère porteuse" car il "renforce l'amalgame". "Dès que je suis née, j'ai toujours su qui était ma mère, mon père, qui m'avait porté, qui avait donné ses graines", affirme-t-elle.
Ses parents lui ont expliqué aussi avoir rémunéré Mary. "Quand on dit +telle femme a été payée tant d'euros pour porter l'enfant de tel couple+, je peux comprendre que ça choque", dit-elle.
Plutôt que de transaction, elle préfère parler de "dédommagement": "C'est une personne qui a un métier, le lâche pendant neuf mois pour porter un enfant, doit rendre des comptes tous les jours à l'agence de gestatrices, la clinique, le couple, passe des examens presque chaque semaine, ça demande du temps, de l'argent...", argumente-t-elle.
Les opposants à la GPA, comme le professeur René Frydman, père du premier bébé éprouvette, pointent eux les lourdes implications éthiques de la "marchandisation du corps".
En France, le chef de l'Etat Emmanuel Macron s'est prononcé pour le maintien de l'interdiction.
En Asie, l'Inde et la Thaïlande, où a éclaté en 2014 le scandale d'une "usine à bébés", ont depuis interdit la pratique aux couples étrangers, qui se sont reportés sur des pays voisins comme le Laos ou le Cambodge.
"La GPA que je défends, ce n'est pas celle-là. S'il y avait un système compétent en France, les gens n'iraient pas dans ces pays et il n'y aurait pas ces cas extrêmes", soutient Valentina.
Mais l'adolescente reconnaît que la société française n'est pas prête: "Certains comparent ça à de la prostitution. On ne peut pas mettre en place la GPA dans cet environnement-là".
A-t-elle imaginé pouvoir un jour porter l'enfant d'une autre femme? "J'y ai déjà réfléchi. Il faut un courage et une maturité que je n'ai pas encore. Je n'ai que 18 ans, je ne connais encore rien de cette partie de la vie".
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