Condamné par contumace à la réclusion à perpétuité en Italie, sa route l'a mené au Mexique, en France et au Brésil où l'homme de 63 ans est régulièrement menacé d'extradition vers Rome déterminée à punir une des dernière figures des "années de plomb" de la décennie 70.
Polyglotte, polémiste infatigable à la voix douce, Battisti est né au sud de Rome le 18 décembre 1954 dans une famille communiste, mais aussi catholique, comme lui-même.
Après de brefs séjours en prison pour des délits de droit commun, il rejoint à la fin des années 1970 la lutte armée au sein du groupuscule des "Prolétaires armés pour le communisme" (PAC).
"Prétendre changer la société avec des armes, c'est une connerie. Mais enfin! A l'époque tout le monde avait des flingues!", assurait-il en 2011. "Il y avait des guérilleros dans le monde entier. L'Italie vivait une situation prérévolutionnaire".
Arrêté à Milan et écroué en 1979 en Italie, il s'évade en 1981. En 1993, il est condamné à la prison à perpétuité par contumace pour deux meurtres et deux complicités de meurtres commis en 1978 et 1979, crimes dont il se dit innocent.
Après un passage par le Mexique, Battisti trouve refuge en France de 1990 à 2004, bénéficiant de la protection de l'ancien président socialiste François Mitterrand, qui s'était engagé à n'extrader aucun militant d'extrême-gauche renonçant à la lutte armée.
Comme une centaine de militants italiens des années 70, il refait sa vie à Paris.
Gardien d'immeuble pour assurer ses fins de mois, il entame une carrière d'écrivain, publiant une douzaine de polars à forte teneur autobiographique, qui brassent les thèmes d'un passé qui ne passe pas, de la rédemption et de l'exil d'ex-militants extrémistes.
D'une certaine façon ses titres font sens: "Les habits d'ombre", "Jamais plus sans fusil", "Avenida Révolucion", "Dernières cartouches", "Ma cavale" préfacé par Fred Vargas, son indéfectible soutien, ou encore "Ser Bambu" ("Etre Bambou", c'est-à-dire plier mais rester solide, selon l'expression brésilienne).
"Plutôt mourir au Brésil"
En 2004, le gouvernement de Jacques Chirac décide de mettre fin à la "jurisprudence Mitterrand" et d'extrader Battisti.
Malgré l'appui d'un collectif de personnalités de gauche composé de la romancière Fred Vargas et du philosophe Bernard-Henri Levy, la justice française rejette les recours de Battisti.
Il s'enfuit alors au Brésil sous une fausse identité avec, selon lui, l'aide des services secrets français. Mais en 2007, il est arrêté à Rio de Janeiro après trois années de clandestinité. Incarcéré pendant quatre ans, il observe une grève de la faim affirmant préférer "mourir au Brésil plutôt que de retourner en Italie".
"Ecrire pour ne pas me perdre dans le brouillard des journées interminables, me répétant que ce n'est pas vrai. Que ce n'est pas moi, cet homme que les médias ont transformé en monstre puis réduit au silence des ombres", écrit-il dans "Ma cavale" qu'il rédige en prison.
En 2009, la Cour suprême brésilienne autorise son extradition mais laisse la décision finale au président Lula qui refuse finalement de l'extrader. Furieuse, l'Italie rappelle son ambassadeur à Brasilia.
A sa libération en juin 2011, il obtient un répit: le Brésil lui accorde un permis de résidence permanente. Battisti s'installe à Cananeia, un port au sud-est du pays où il continue à écrire. Il rêve d'amnistie. "D'autres pays y ont bien réussi", affirme-t-il. Il a un fils.
Mais son existence est suspendue au gré des décisions contradictoires de la justice brésilienne. En 2015, une juge ordonne une nouvelle expulsion. La même année, il se marie avec sa compagne brésilienne dans un camping de Cananeia.
Il est interpellé deux ans plus tard à la frontière bolivienne, accusé de vouloir fuir. Il est placé sous surveillance électronique pendant quatre mois. Après l'élection en octobre dernier du président d'extrême droite Jair Bolsonaro qui avait promis son extradition, Battisti, usé par près de 40 ans d'une existence en suspens, passe à la clandestinité.
Jusqu'à à l'annonce de son arrestation à Santa Cruz de la Sierra, dans le centre de la Bolivie, dans la nuit de samedi à dimanche...
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