Nouveau rétropédalage fiscal en vue pour l'exécutif? Interrogé lundi sur France inter, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux a assuré que le maintien de cet impôt pour les 20% de ménages les plus aisés était "sur la table".
La promesse de campagne d'Emmanuel Macron concernait les "80% des Français" les moins aisés, a souligné M. Griveaux, assurant que la suppression de la taxe d'habitation pour les ménages les plus riches n'"était pas dans le projet initial".
"La question est de savoir si nous irons sur ces 20% restants, oui", a reconnu ce proche du chef de l'Etat, confirmant le revirement initié la veille par le ministre des Finances Bruno Le Maire.
Invité dimanche du "Grand Rendez-Vous" Europe 1-CNews-Les Echos, ce dernier a assuré que Bercy pourrait revoir sa copie si une demande en ce sens venait à être formulée dans le cadre du débat national lancé par Emmanuel Macron.
"Si nous répondons non à chaque demande des Français, que nous ne sommes pas capables d'écouter la demande de justice, nous ne réussirons pas le grand débat, qui doit s'ouvrir dans les prochaines semaines", a expliqué M. Le Maire.
Une façon d'ouvrir la porte à un rééquilibrage de la politique fiscale de l'exécutif, accusée de favoriser les plus riches, sans revenir sur la suppression de l'impôt sur la fortune (ISF), entrée en vigueur début 2018.
"La priorité à mes yeux n'est pas de rétablir un ISF qui n'a jamais réglé le problème du chômage ni celui de la pauvreté en France", a insisté le ministre, refusant tout retour en arrière sur ce point.
"Il ne s'agit pas que le grand débat national conduise à détricoter ce qui a été fait", a ajouté le locataire de Bercy, alors que l'exécutif a déjà dû renoncer ces dernières semaines à plusieurs mesures, dont la hausse de la taxe sur les carburants.
"Panique fiscale"
Durant la campagne, Emmanuel Macron avait promis de supprimer la taxe d'habitation pour 80% des ménages, à raison de trois tranches successives entre 2018 et 2020, pour un coût total de près de dix milliards d'euros.
Mais pour éviter de voir sa réforme retoquée par le Conseil constitutionnel, attaché au principe d'"égalité devant l'impôt", le chef de l'Etat a finalement annoncé fin 2017 l'extension de cette mesure à l'ensemble des Français.
Cette extension, censée intervenir en 2021, coûtera près de sept milliards d'euros à l'Etat. Elle doit faire l'objet de compensations pour les collectivités locales, sous une forme qui n'a pas encore été arrêtée.
Une situation qui explique les hésitations du gouvernement, confronté à de fortes contraintes budgétaires après son revirement sur la taxe carbone, tandis que le ralentissement de la croissance menace de faire déraper le déficit public.
Le maintien de la taxe d'habitation pour les plus riches pourra-t-il s'articuler avec les exigences du Conseil constitutionnel? "On ne peut pas nous expliquer qu'il faut plus mettre à contribution ceux qui ont plus, et quand c'est fait invoquer l'égalité devant l'impôt", a estimé lundi Benjamin Griveaux.
Selon le porte-parole du gouvernement, "c'est une question de droit" et "ce sera tranché dans le cadre d'un débat au Parlement".
"Si on ferme toutes les portes à toutes les réflexions qu'on peut avoir, alors on ferme le grand débat", a jugé de son côté le nouveau délégué général de La République en marche, Stanislas Guerini, interrogé sur Cnews.
Pour Christian Eckert, ex-secrétaire d'Etat au Budget de François Hollande, "revenir aujourd'hui à la case départ est curieux... et risque d'être déclaré inconstitutionnel". "Une chose est sûre, c'est que cela a été mal préparé", a ajouté sur Facebook l'ancien député socialiste.
Un avis partagé par le président LR de la commission des Finances à l'Assemblée nationale, Eric Woerth. "On n'y comprend plus rien", a assuré sur RTL l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy, accusant l'exécutif de "changer d'avis sans arrêt". "La panique fiscale, c'est quelque chose d'extrêmement dangereux", a-t-il mis en garde.
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