"Je répondrai aux questions qu'on me posera", avait assuré à Radio Notre-Dame le cardinal de 68 ans en marge de l'assemblée plénière des évêques à Lourdes il y a deux mois. Ces derniers jours, son conseil entretenait toutefois un léger doute sur sa présence au palais de justice pour ce procès prévu sur trois jours.
Dimanche, le cardinal n'a pas voulu se montrer aux traditionnels voeux diocésains de Lyon, jugeant "plus juste" de "rester dans la réserve et le silence (...) à la veille de journées graves", a-t-il expliqué dans un courrier lu pendant la cérémonie.
"Demandons au seigneur que s'accomplisse le travail de la justice, demandons lui aussi qu'il guérisse tout ce qui doit l'être, dans le coeur des victimes d'actes de pédophilie aussi injustes que terribles", a encore écrit le cardinal.
Le scandale lyonnais a éclaté en 2015 avec la mise en cause du père Bernard Preynat pour des abus commis un quart de siècle plus tôt sur de jeunes scouts.
Estimant que parce qu'il était au courant de ces agissements anciens, Mgr Barbarin aurait dû lui-même dénoncer le prêtre à la justice, des victimes ont aussi porté plainte contre lui.
"Depuis le départ, on met en évidence la responsabilité du diocèse de Lyon qui protège depuis 25 ans un pédophile", a dénoncé François Devaux, cofondateur de La Parole libérée, l'association à l'origine des révélations.
En 2016, le parquet avait renoncé aux poursuites. Dans les années 2000, l'archevêque de Lyon avait eu connaissance, par un tiers, des agissements du prêtre: le procureur a conclu à la prescription du délit de non-dénonciation, considéré comme "instantané".
"Tous tombés sur moi"
Mais neuf plaignants ont lancé depuis une procédure de citation directe devant le tribunal sur la base, selon eux, d'une "mauvaise interprétation de la loi" lors du classement sans suite de leur première plainte.
Outre les explications des six responsables du diocèse, dont les actuels archevêque d'Auch Maurice Gardès et évêque de Nevers Thierry Brac de la Perrière, M. Devaux attend également "la position de la justice française sur ces faits-là et comment elle interprète les lois".
La défense, de son côté, crie à l'acharnement et compte sur le procès pour "rétablir un certain nombre de vérités car on ne répare pas une injustice par une autre", prévient un avocat du cardinal, Me Jean-Félix Luciani. Les accusés encourent trois ans de prison et 45.000 euros d'amende.
Le cardinal Barbarin l'assure : en 2015, il a "mis en œuvre ce qui (lui) avait été dit par Rome". "Après tout le monde est tombé sur moi", déplore-t-il, même s'il compte sur "le soutien de la prière et d'énormément de monde, pas bruyant".
"Je demande qu'on me montre en quoi, dans ma manière d'agir il y avait une faute. S'il y en a une et qu'on me la montre et qu'on me l'explique, et bien j'assumerai", assurait le religieux en novembre dernier.
Au premier rang de ses soutiens, le pape François. Celui-là même qui a condamné cet été dans une lettre toutes formes d'abus, dans un contexte plus large de révélations de nombreux scandales pédophiles à l'étranger.
Le cardinal espagnol Luis Ladaria Ferrer, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi à Rome, était aussi poursuivi mais le Vatican a opposé son immunité.
Cette affaire a fragilisé le primat des Gaules, dont la démission a été réclamée jusqu'au sein même de l'Eglise. La pétition lancée en août par le père Pierre Vignon, prêtre dans le Vercors - écarté depuis de ses fonctions de juge canonique - a recueilli plus de 105.000 signatures.
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