"Nettoyage" idéologique au sein de l'administration, décisions controversées affectant les minorités, choc libéral en vue pour l'économie: ceux qui réclamaient un changement radical pour la première puissance d'Amérique latine ont été servis.
Jair Bolsonaro, 63 ans, avait annoncé la couleur mardi lors de son discours d'investiture, promettant de "rétablir l'ordre" et de "libérer le peuple du socialisme et du politiquement correct".
Il n'a pas tardé à passer aux actes: dès le soir de son investiture, une ordonnance polémique mettait la démarcation de terres réservées aux tribus autochtones sous la responsabilité du ministère de l'Agriculture.
Une façon, selon ses détracteurs, de livrer les territoires ancestraux des Indiens du Brésil à l'appétit vorace de l'agro-négoce, dont l'influent lobby parlementaire a promis de soutenir le gouvernement au Congrès et a obtenu la nomination de sa cheffe de file comme ministre de l'Agriculture, Tereza Cristina.
"Nouvelle ère"
Mercredi, au lendemain de l'investiture du président, ses 22 ministres ont pris leurs fonctions, déterminés à se lancer dans une croisade contre la criminalité, la corruption et les idéologies progressistes.
"Je crois aux desseins de Dieu, qui a réuni cette équipe, a levé une armée", a affirmé Damares Alves, l'une des deux seules femmes du gouvernement, lors de son intronisation comme ministre de la Femme, de la Famille et des Droits de l'Homme.
Cette femme pasteur évangélique a suscité une avalanche de railleries sur les réseaux sociaux en affirmant que le Brésil entrait dans une "nouvelle ère" où "les garçons s'habillent en bleu et les filles en rose".
Le "nettoyage" idéologique annoncé prévoit le limogeage de tous les contractuels de l'administration publique qui ne seraient pas alignés sur la ligne officielle.
"On a l'impression que les membres du gouvernement ne savent pas quels sont les problèmes les plus sérieux du Brésil. Et quand ils touchent à des questions importantes, leurs réponses sont très simplistes", estime Maria Herminia Tavares de Almeida, politologue de l'Université de Sao Paulo (USP).
Autre mesure polémique cette semaine: une ordonnance qui stipule que le gouvernement pourra "superviser, coordonner, surveiller" les ONG.
De quoi susciter l'inquiétude des nombreuses associations de défense des droits de l'homme qui avaient averti dès la campagne électorale des risques pour la démocratie de l'arrivée au pouvoir d'un nostalgique de la dictature militaire (1964-1985).
"Lune de miel"
En revanche, les milieux d'affaires ont salué avec euphorie le discours d'intronisation du nouveau ministre de l'Économie Paulo Guedes, gourou ultra-libéral de Jair Bolsonaro. Ses priorités: réforme des retraites, réforme fiscale et privatisations.
Pour lui, la réforme des retraites est le "premier et plus grand défi" du gouvernement, qui garantira "dix ans de croissance soutenue" si elle est approuvée "en deux ou trois mois".
Elle est cruciale pour réduire la dette gigantesque du Brésil, le système de répartition étant très généreux dans un pays de 210 millions d'habitants qui vieillit.
La Bourse de Sao Paulo s'est envolée, pour la première fois au-dessus des 90.000 points. Le réal s'est fortement apprécié face au dollar.
Mais la Bourse a terminé la semaine étale, signe d'une inquiétude diffuse après des propos de Bolsonaro notamment sur une réforme des retraites qui serait moins ambitieuse qu'espéré. Et "nous ne sommes toujours pas certains que M. Bolsonaro (...) sera capable de faire approuver une réforme crédible par un Congrès très atomisé", notent les consultants d'Eurasia.
"Pour l'instant, c'est la lune de miel avec le président", explique André César, du cabinet de consultants Hold. Mais "le marché est parfois bipolaire. L'euphorie d'aujourd'hui peut se transformer en dépression demain".
L'investiture de M. Bolsonaro a également été l'occasion de valider une vision de la politique extérieure totalement alignée sur celle des Etats-Unis de Donald Trump. Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo, venu à Brasilia pour l'investiture, s'est félicité de l'"opportunité de créer une relation réellement transformée" avec Brasilia.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a parlé d'une "nouvelle fraternité", ravi que Jair Bolsonaro ait l'intention de suivre les pas de M. Trump en transférant l'ambassade du Brésil de Tel Aviv à Jérusalem.
Le nouveau ministre des Affaires Étrangères, Ernesto Araujo, a remporté la palme de l'excentricité en promettant d'"inverser la mondialisation et la repousser vers son point de départ" dans un discours émaillé de citations en grec et tupi-guarani.
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