Arrivé au pouvoir en juin à la faveur d'une motion de censure contre le conservateur Mariano Rajoy, M. Sanchez, dont le Parti socialiste ne compte que 84 députés sur 350, sait que les jours de son gouvernement minoritaire sont comptés.
Encore plus depuis que les indépendantistes catalans, qui ont soutenu son investiture il y a six mois et sans qui il n'a pas de majorité, refusent de voter le budget. Ils prétendent ainsi protester contre les lourdes peines de prison réclamées contre leurs dirigeants emprisonnés pour leur rôle dans la tentative de sécession d'octobre 2017.
Alors qu'il avait un ton conciliant depuis son arrivée à la Moncloa où il était entré avec la promesse de reprendre le dialogue avec les Catalans, son gouvernement a brutalement changé de langage en début de semaine face à la rhétorique séparatiste et lui-même a franchi un nouveau cap mercredi.
Les comparant aux partisans du Brexit en Grande-Bretagne, il a accusé devant le parlement, les indépendantistes catalans de "ne plus avoir que le mensonge pour soutenir leurs positions politiques", énumérant leurs promesses "fallacieuses".
Et après que le président catalan Quim Torra a exhorté ses partisans à suivre l'exemple de la Slovénie qui a déclenché un conflit meurtrier en proclamant unilatéralement son indépendance de la Yougoslavie en 1991, il les a prévenus que "tout ce qui sort (du cadre) de la Constitution" déclencherait une "réponse ferme" de l'Etat.
Andalousie, le déclic
Madrid avait déjà averti lundi que l'Etat reprendrait en main le maintien de l'ordre en Catalogne si les autorités locales étaient incapables de le faire, après la coupure d'une autoroute par des militants radicaux.
Pour Pablo Fernandez Vazquez, politologue à l'université américaine de Pittsburgh, le "durcissement de ton" de M. Sanchez a pour but de le "vacciner" contre les critiques l'accusant d'être l'otage des séparatistes, de "laisser moins d'espace" à "ceux qui disent: vous êtes trop mous avec les nationalistes catalans".
Car la donne politique a changé début décembre avec la débâcle des socialistes lors d'élections régionales anticipées dans leur fief d'Andalousie, où les centristes de Ciudadanos et l'extrême droite de Vox ont enregistré des scores sans précédent en faisant campagne contre l'indépendantisme.
"Je ne pense pas que le Parti Socialiste ait envie d'aller aux élections dans une position où on puisse le voir comme un ami des indépendantistes", souligne de son côté Berta Barbet, responsable du blog Politikon.
Contre-attaquant, M. Sanchez n'a cessé pour sa part d'accuser mercredi la droite de vouloir s'allier avec l'extrême droite en Andalousie, dénonçant un "pacte honteux" représentant "une Espagne périmée".
Front social
Ayant tout intérêt à éloigner les débats de la question catalane, qui favorise la droite, Pedro Sanchez a par ailleurs repris l'initiative sur le front social qui le "place (avec la gauche radicale de Podemos) dans une position plus avantageuse", selon Pablo Fernandez Vazquez.
Après avoir annoncé en début de mois qu'il présenterait son budget en janvier, malgré l'opposition des indépendantistes catalans, il a finalement révélé mercredi qu'il adopterait sans attendre par décret le 21 décembre sa mesure phare: une augmentation du salaire minimum de 22% à 1.050 euros bruts mensuels l'an prochain.
"Un pays riche ne peut pas avoir de travailleurs pauvres", a martelé M. Sanchez en se targant de "la hausse la plus importante depuis 1977".
Sans oublier au passage de souligner que les Catalans seraient parmi les premiers à en bénéficier.
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