Contrairement à d'autres industries, son secteur ne peut pas constituer de stocks en prévision d'un Brexit sans accord qui verrait le Royaume-Uni couper brusquement les ponts avec le continent à partir du 29 mars 2019.
"Pour nous, la fraîcheur du produit est essentielle", explique depuis son siège londonien le directeur général de Natoora, alors qu'à proximité des caisses de choux de Bruxelles et de citrons sont chargés dans des camions.
Natoora est principalement un grossiste en fruits et légumes, mais possède également quelques magasins de vente directe ainsi que plusieurs exploitations au Royaume-Uni.
"Nous sommes une entreprise très dépendante des saisons (...) et une énorme partie de notre production ne provient pas du Royaume-Uni, en particulier de nombreux fruits (...) Nous sommes contraints de les faire venir du continent", raconte à l'AFP cet Italo-Argentin de 44 ans.
Natoora, entreprise qu'il a fondée il y a 14 ans, fournit plus d'un millier de restaurants à Londres, Paris et New York, avec des produits britanniques, italiens, français et espagnols, lesquels sont préparés et emballés sur son site situé non loin de la Tamise et près du centre de Londres.
Il cherche désormais à grandir à l'étranger, en visant une implantation pour des livraisons à Copenhague, Stockholm et Madrid.
"En moyenne, il faut compter 36-48 heures", entre le moment où le produit est récolté et celui où il est réceptionné par le restaurant, souligne M. Fubini, dont l'entreprise compte 300 employés et réalise un chiffre d'affaires annuel de 30 millions de livres (34 millions d'euros).
Par conséquent, le Brexit "pose clairement un risque de perturbation de la chaîne d'approvisionnement ", prévient-il, puisque Natoora fait venir ses fruits et légumes dans des camions réfrigérés à travers le tunnel sous la Manche.
"J'espère que le bon sens, en particulier pour quelque chose de crucial comme les produits frais, va nous aider à traverser tout ça", souligne le dirigeant, alors qu'un vote à haut risque du Parlement britannique est prévu mardi 11 décembre sur l'accord négocié entre Londres et Bruxelles.
Utiliser un hélicoptère ?
"D'un point de vue logistique, nous avons quatre livraisons chaque semaine de Milan, cinq de Paris, deux d'Espagne (...) et des livraisons quotidiennes en provenance du Royaume-Uni", détaille M. Fubini.
"Nous ne pouvons pas faire grand chose. Nous ne pouvons pas stocker, nous ne pouvons pas raccourcir notre chaîne d'approvisionnement à moins d'utiliser un hélicoptère ! Pour ce qui est des préparatifs, tout ce qu'on peut faire c'est attendre" prévient-il.
Il reconnaît toutefois pouvoir faire des stocks pour des produits comme la charcuterie, le fromage, l'huile d'olive et les haricots, qui représentent un cinquième de son chiffre d'affaires.
"Nous pouvons stocker davantage" ce type de biens, d'autant que "nous avons acquis un nouveau site où nous avons encore de la place", selon lui.
De grands groupes du secteur ont déjà prévenu qu'ils prévoyaient de constituer des stocks, comme le groupe agroalimentaire Premier Foods ou encore le géant des supermarchés Tesco. Le détaillant en vins Majestic Wines stocke, lui, des bouteilles en prévision du Brexit.
Au-delà, le secteur automobile et la pharmacie sont contraints de faire de même, comme l'industrie manufacturière à l'image du motoriste Rolls-Royce.
Mais pour M. Fubini, le Brexit pourrait avoir un impact plus large sur son activité et son personnel dont une grande partie vient d'Europe de l'Est, alors que le nombre de candidats pour des postes à pourvoir au sein de son entreprise à Londres est en forte baisse depuis l'année dernière.
"Notre entreprise est vraiment en première ligne puisque nous sommes vraiment dépendants de l'attitude des consommateurs. L'activité dans les restaurants et dans nos magasins est très sensible aux craintes des clients", explique-t-il.
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