Alors que la tension et l'angoisse sont maximales au sommet de l'Etat, le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand a annoncé vendredi à l'AFP que "le président, lucide sur le contexte et la situation", avait décidé d'attendre avant de prendre la parole comme le réclament une partie de l'opposition et des manifestants.
Trois semaines après la première grande mobilisation contre la hausse de la taxe sur les carburants, le gouvernement se prépare au pire et craint une nouvelle flambée de violences pour "l'acte IV" du mouvement des "gilets jaunes".
Un dispositif "exceptionnel" de 89.000 membres des forces de l'ordre, dont 8.000 à Paris, sera déployé sur tout le territoire pour tenter d'éviter les mêmes scènes d'émeutes que samedi dernier, notamment sous l'Arc de Triomphe.
A Paris, pour la première fois depuis des décennies, l'Etat engagera même des "VBRG", ces véhicules blindés à roue de la gendarmerie, pour maintenir l'ordre face notamment à des groupuscules d'extrême gauche et d'extrême droite déterminés à en découdre.
Jeudi, tous les membres du gouvernement ont multiplié les appels au calme et à la responsabilité, relayés désormais par la plupart des partis d'opposition, les syndicats et même les évêques de France.
"Il faut sauver la République. Elle est aujourd'hui menacée", s'alarme le président du Sénat Gérard Larcher (LR).
Plusieurs responsables de la majorité font état de "remontées inquiétantes". Des élus et leurs familles ont été intimidés. Des proches collaborateurs de M. Macron ont reçu des menaces de mort jusque sur leur téléphone.
"On ne peut plus les arrêter"
"Si je ne me fais pas casser la gueule d'ici la fin du mandat, je considère que j'aurai de la chance. Je me dis que ça va arriver, dans ce climat violent, d'hystérisation", dit une députée LREM.
Dans le Figaro vendredi, Jacline Mouraud, une des représentantes du mouvement prévient: les "gilets jaunes, on ne peut plus les arrêter".
Les concessions du gouvernement, qui a définitivement abandonné, après 24 heures d'extrême confusion, toute augmentation de la taxe carbone sur les carburants en 2019, semblent n'avoir eu aucun effet.
Si ce n'est d'avoir fragilisé le Premier ministre Edouard Philippe, en première ligne depuis quelques jours et qui défendait une simple suspension de la hausse avant d'être brutalement désavoué par l'Elysée.
Emmanuel Macron est plus que jamais la cible numéro un des "gilets jaunes". Sur tous les barrages, les appels à la démission fusent. Sa visite éclair dans la semaine à la préfecture du Puy-en-Velay, incendiée samedi, s'est achevée dans un flot d'insultes et de menaces.
Sur les réseaux sociaux, les mots d'ordre évoquent un renversement des institutions: "dissolution de l'Assemblée nationale", "Manu, on arrive !", "Pot de départ de Macron !", ou encore "Tous à la Bastille".
"Il est conscient que pour l'instant il est l'incarnation de ce que les protestataires portent. Mais il ne renonce jamais", soutient un proche du président.
En attendant, Paris et d'autres grandes villes se préparent à vivre un nouveau samedi noir. La tour Eiffel et le Louvre resteront fermés, tout comme les commerces sur les Champs-Elysées, point de crispation principal.
A Bordeaux, une dizaine d'établissements culturels et espaces publics seront fermés. Six matches de la Ligue 1 de football ont d'ores et déjà été reportés.
L'exécutif craint une alliance entre ultradroite, ultragauche, "gilets jaunes" les plus remontés et jeunes de banlieue, dont certains se sont livrés à des pillages samedi dernier dans la capitale.
On redoute aussi une extension à d'autres secteurs, notamment les agriculteurs, les transporteurs routiers et l'éducation où la situation est très tendue.
Plus de 700 lycéens ont ainsi été interpellés par les forces de l'ordre jeudi lors de la quatrième journée de mobilisation lycéenne, marquée une nouvelle fois par des incidents et des violences.
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