La tension est telle que le Conseil de sécurité de l'ONU tiendra lundi une réunion d'urgence, selon des diplomates, qui ont précisé qu'elle avait été réclamée par les deux pays. Moscou a demandé qu'elle ait lieu à 11H00 (16H00 GMT), a-t-on précisé à l'AFP de même source.
Dans la nuit de dimanche à lundi, le Conseil de sécurité et de défense ukrainien réuni d'urgence a proposé au président Petro Porochenko d'introduire la loi martiale "pour 60 jours", a annoncé le secrétaire de cette structure.
Cette décision doit être entérinée par le Parlement ukrainien, dont une session extraordinaire est prévue dans l'après-midi, mais un vote positif est loin d'être garanti.
Lors de la réunion du Conseil de sécurité, le président Porochenko a dénoncé un "acte fou de la Russie contre l'Ukraine", assurant que l'"attaque" était préméditée". "La loi martiale ne signifie par une déclaration de guerre" à la Russie, "elle sera introduite uniquement pour la défense", a-t-il assuré.
Les tensions entre l'Ukraine et la Russie autour de la mer d'Azov ont connu une brusque flambée dimanche lorsque Kiev a accusé la Russie d'avoir percuté un navire ukrainien et bloqué l'accès à cette petite mer, située entre la Crimée, annexée en 2014 par Moscou, et l'est de l'Ukraine, théâtre d'une guerre avec les séparatistes prorusses.
La situation s'est rapidement dégradée, l'Ukraine accusant dans la soirée les Russes d'avoir capturé ces navires après leur avoir tiré dessus dans cette zone stratégique.
Axe stratégique
Les bateaux - deux vedettes blindées, le Berdiansk et le Nikopol, et le remorqueur Iani Kapu - tentaient d'entrer depuis la mer Noire dans le détroit de Kertch, séparant la Crimée de la Russie et marquant l'accès à la mer d'Azov.
Sur un total de 23 militaires à bord, six ont été blessés dont deux grièvement, selon l'armée ukrainienne.
La Russie a confirmé l'arraisonnement et l"'usage d'armes", en accusant les navires ukrainiens "de mener des actions illégales dans les eaux territoriales russes" et faisant état de trois Ukrainiens blessés.
La porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova a dénoncé les "méthodes de bandits de grands chemins" de l'Ukraine, dans une déclaration transmise à l'AFP: "d'abord des provocations, puis de fortes pressions, puis des accusations d'agression".
La marine ukrainienne assure cependant avoir averti la Russie à l'avance de l'itinéraire de ses navires.
Selon elle, ses navires ont passé plusieurs heures devant le détroit de Kertch, alors qu'un navire pétrolier placé sous le pont de Crimée, qui enjambe le détroit de Kertch, bloquait l'accès au détroit.
Ce détroit, la seule voie maritime entre la mer Noire et la mer d'Azov, est un axe stratégique de première importance, pour la Russie comme pour l'Ukraine.
"Nous attendons de la Russie qu'elle restaure la liberté de passage dans le détroit de Kertch et nous appelons toutes les parties à agir avec le maximum de retenue afin d'aboutir à une désescalade immédiate de la situation", a exhorté l'Union européenne. L'Otan a aussi appelé "à la retenue et à la désescalade".
"Violation" du droit international
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Pavlo Klimkin a appelé l'Occident à "former une coalition claire pour résister aux actes d'agression de la Russie".
"Sur les instructions du président Porochenko, nous faisons immédiatement appel au Conseil de sécurité des Nations unies", a renchéri Volodymyr Ielchenko, représentant permanent de l'Ukraine auprès de l'ONU.
La Russie revendique le contrôle des eaux au large de la Crimée depuis l'annexion de la péninsule. Kiev et les Occidentaux accusent Moscou d'"entraver" délibérément la navigation des navires commerciaux via le détroit de Kertch.
Les difficultés sont apparues avec la construction par Moscou du pont très controversé de 19 kilomètres de long dans le détroit de Kertch. L'installation de ses arches en 2017 empêche le passage d'une partie des navires. Cette année, les garde-frontières russes ont commencé à retenir des bateaux, officiellement pour des contrôles.
Kiev estime que Moscou pourrait aller jusqu'à préparer une offensive contre Marioupol, dernière grande ville sous contrôle de Kiev dans l'est du pays.
Les eaux peu profondes de la mer d'Azov baignent le sud du Donbass, région ukrainienne où le conflit armé avec les séparatistes prorusses a fait plus de 10.000 morts en quatre ans.
Kiev et l'Occident accusent la Russie de soutenir militairement les séparatistes, ce que Moscou dément malgré de nombreuses preuves.
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