Une situation de crise politique qui intervient au moment où la tension était vive dans la rue à Paris samedi en raison de violences en marge de la nouvelle journée de manifestation nationale des "gilets jaunes".
Les sénateurs attendaient une réaction du ministre des Comptes publics, en déplacement en province. Certains s'étaient regroupés devant un écran de télévision pour suivre l'évolution des violences sur les Champs-Elysées.
Tout est parti d'un tweet de M. Darmanin, vendredi après-midi, critiquant une mesure tout juste votée à l'unanimité par les sénateurs, en faveur des maires des petites communes. L'amendement en question prévoyait le retour partiel au régime fiscal d'avant 2017, plus favorable, pour les indemnités que perçoivent ces élus.
"A l'initiative des Républicains le Sénat vient de voter une augmentation de 125% de la déduction fiscale des élus, qui revient à les exonérer d'impôt jusqu'à 1500 euros/mois sur leurs indemnités! Je m'y opposerai évidemment en seconde lecture à l'Assemblée", avait écrit M. Darmanin, issu de la droite.
Le tweet a immédiatement suscité un tollé sur tous les bancs du Sénat, en majorité à droite, le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau dénonçant "une attaque contre la démocratie et même contre la République".
La séance avait été levée, dans l'attente des conclusions d'une conférence des présidents, convoquée samedi matin.
La conférence des présidents a demandé le "retrait" du tweet, "je vais donc suspendre la séance jusqu'à ce que le gouvernement ait informé le Sénat du retrait de ce tweet", a annoncé M. Larcher dans l'hémicycle, applaudi sur tous les bancs.
"Alors, nos travaux pourraient se poursuivre", a-t-il ajouté avant de lever la séance une nouvelle fois.
"Je suis ici à la disposition des sénateurs pour suivre les débats", a pour sa part déclaré à sa sortie de l'hémicycle Olivier Dussopt, présent sur le banc du gouvernement aux côtés du ministre chargé des Relations avec le Parlement Marc Fesneau.
"Elus-bashing"
Lors de sa brève prise de parole, M. Larcher a indiqué s'être entretenu vendredi soir, "sur son appel", avec le Premier ministre qui lui "a fait part de sa volonté d'apaisement à la fois avec les élus locaux et avec la représentation nationale".
"Le gouvernement, par la voix du ministre chargé des Relations avec le Parlement, que je remercie, a confirmé que ce n'était pas la position du gouvernement", a ajouté le président du Sénat.
Des assurances qui n'ont pas suffi à calmer la colère des sénateurs, très remontés contre ce qu'ils considèrent comme un "mépris" à la fois de la représentation nationale et des maires des petites communes.
"Il y en a marre que ce gouvernement tape les élus. Ce gouvernement a un fil rouge, c'est l'élus-bashing", avait lancé M. Retailleau. "Nous n'avons voulu accorder aucun privilège fiscal. Nous avons simplement voulu revenir à une situation antérieure pour régler une injustice grave", avait-il expliqué, avec le soutien de la gauche.
Il s'agit de "revenir sur une mesure dont on n'avait pas mesuré les conséquences", opinait Claude Raynal (PS).
"Absent de l'hémicycle", M. Darmanin "a caricaturé un vote unanime du Sénat", a accusé M. Larcher. Sa déclaration est "en contradiction avec les propos tenus par le président de la République et le Premier ministre (à l'occasion du congrès des maires réuni durant la semaine à Paris, NDLR) qui disaient avoir entendu et compris le sentiment d'abandon, de lassitude qui gagne les maires, en particulier les maires des petites communes".
Le Sénat a tout juste entamé l'examen du projet de budget, déjà adopté en première lecture par l'Assemblée. Quarante-et-un amendement ont été examinés, il en reste 827 sur la première partie (impôts et taxes). L'ensemble du texte doit être adopté le 11décembre.
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