Le Franco-Libano-Brésilien, toujours en garde à vue au Japon, a été arrêté lundi pour avoir dissimulé ses revenus de président du conseil d'administration de Nissan à hauteur de 5 milliards de yens entre juin 2011 et juin 2015.
Il lui est reproché d'avoir fait la même chose pour les trois exercices comptables suivants, ont indiqué vendredi les quotidiens nippons Asahi Shimbun et Nikkei, soit un total de 8 milliards de yens, l'équivalent de plus de 62 millions d'euros de revenus dissimulés aux autorités financières japonaises.
L'AFP n'a pas été en mesure d'obtenir de confirmation dans l'immédiat.
Celui qui est encore formellement PDG de Renault, mais qui a été débarqué jeudi de la présidence du conseil d'administration de Nissan, est également suspecté de ne pas avoir déclaré un bonus de plus de 30 millions d'euros lié à des plus-values dégagées sur les actions, selon Nikkei.
L'agence de presse Kyodo a de son côté affirmé que Nissan avait payé la soeur de Carlos Ghosn 100.000 dollars (87.900 euros) par an depuis 2002 pour une mission de conseil fictive.
Dans un courrier interne dont l'AFP a pu voir une copie, le patron du groupe japonais Hiroto Saikawa, qui avait déjà durement critiqué celui qui fut son mentor, lors d'une conférence de presse lundi, est reparti à la charge contre Carlos Ghosn.
"Vous seriez surpris"
Concernant les faits mis au jour par une enquête interne menée par le constructeur japonais, il a assuré: "vous seriez probablement surpris des découvertes faites".
"Nous ne pouvons tolérer ce qui a été mis en évidence", a-t-il poursuivi, sans donner de détails précis.
Dans le même message, le patron (président exécutif) de Nissan promet toutefois: "en ce qui concerne le partenariat avec Renault et Mitsubishi Motors, cet événement n'a fondamentalement aucun impact, et nous ferons de notre mieux pour stabiliser la relation entre les trois entreprises".
Le sort de Carlos Ghosn chez Mitsubishi devrait être tranché lors d'un conseil d'administration lundi.
"En ces temps difficiles pour nous, nous devons collaborer de façon plus étroite, plus que jamais", a ajouté Hiroto Saikawa, dans son message.
Passé le choc de l'arrestation de Carlos Ghosn, certains analystes ont soupçonné un "coup d'Etat" de la part de Nissan, qui chercherait à rééquilibrer le mariage à trois (Nissan, Renault et Mitsubishi) mis sur pied par l'influent capitaine d'industrie.
Depuis, les déclarations d'intention se multiplient à Tokyo comme à Paris pour soutenir cet attelage, traversé par des rancoeurs et des jeux de pouvoir que la chute de Carlos Ghosn a exposés au grand jour.
Renault détient 43% de Nissan, qui lui-même possède 15% de Renault (mais sans droit de vote) et 34% de Mitsubishi. Le pouvoir est aux mains du constructeur français depuis qu'il a sauvé son rival japonais de la faillite en 1999, et ce alors que Nissan pèse aujourd'hui près de deux fois plus en Bourse que Renault.
"Nous sommes attachés à la préservation de l'alliance entre Renault et Nissan qui est dans l'intérêt des Français comme dans l'intérêt des Japonais", a répété vendredi le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire.
L'Etat français, qui détient 15% de Renault, est concerné au premier chef par l'avenir du mariage avec Nissan, et occupe le terrain depuis le début du scandale.
M. Le Maire avait par exemple très vite réclamé la mise en place d'une direction par intérim chez Renault, et avait reçu Thierry Bolloré, qui a de facto repris les rênes du constructeur français mardi soir, dès le lendemain.
L'Elysée s'est lui efforcé de calmer le jeu en rejetant toute idée de "manipulation" de la part du groupe japonais.
Reste à savoir comment cet activisme de l'exécutif français est perçu au Japon. Personne chez Nissan n'a oublié la crise déclenchée en avril 2015 lorsqu'Emmanuel Macron, alors ministre de l'Economie, avait augmenté le poids de l'Etat au capital de Renault pour obtenir des droits de vote doubles, un coup de force qui avait fortement déplu côté japonais.
L'Etat a fini par céder les actions en question en novembre 2017, pour revenir à 15% du capital.
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