Interprétant La Négroni dans Lucrèce Borgia puis Ase, la mère du héros dans Peer Gynt, la dernière production de David Bobée, le metteur en scène et directeur du CDN Normandie, Catherine Dewitt, artiste permanente du CDN collabore également à la dramaturgie de cette adaptation audacieuse de la pièce d'Ibsen. Elle nous révèle toute la portée de la pièce.
Quelle a été votre réaction lorsque vous avez découvert cette pièce ?
"J'ai lu la pièce pour la première fois en 1981 au moment de sa création par Patrice Chéreau et j'ai été à la fois fascinée et déroutée. C'est une pièce qui brasse énormément de questions et de mystères. À la lecture de cette pièce, on réalise qu'elle n'a pas été écrite pour le théâtre mais plutôt comme une pièce à lire. Cette pièce surprend et bouleverse. Le spectacle de Chéreau qui était déjà une adaptation en éclairant le sens. Ce que j'apprécie particulièrement dans ce texte d'Ibsen, c'est le fait qu'il soit à la fois très poétique et très engagé."
Pourquoi David Bobée a-t-il choisi de monter cette pièce ?
"Elle 'vivait' au fond de lui depuis longtemps, parce qu'elle a quelque chose de shakespearien dans sa quête et son écriture. Cette pièce est un défi, on ne peut pas monter cette pièce dans son intégralité parce qu'il faut aujourd'hui en restituer le sens profond, saisir quel message elle délivre aujourd'hui dans ce monde 'à la renverse' et montrer dans quelle mesure celui-ci résonne avec l'actualité. Il a fallu que David fasse des choix pour que cette pièce prenne tout son sens car l'originalité de cette pièce tentaculaire est de suivre un même personnage sur une cinquantaine d'années de sa vie, dans sa quête existentielle, mais les coupes et les reconstructions ont été faites dans le respect du texte."
Qui est Peer Gynt et qu'est-ce que son destin nous apprend ?
"Peer Gynt est en quête de lui-même. Mais à travers sa quête de soi, Peer Gynt pour Ibsen devait réveiller le peuple et l'amener à penser grand ! Il réveille les consciences. La question survient très clairement dans la scène des Trolls, dans laquelle le roi des Trolls définit la différence entre les Trolls et les hommes. Il y a très clairement dans cette scène une dénonciation d'une société tournée sur elle-même, fascisante, en résonance avec le monde d'aujourd'hui. À travers le destin de Peer Gynt, David Bobée, par ses choix de dramaturgies, veut inciter le spectateur à questionner son implication dans le monde. Ce qui me touche dans le personnage de Peer Gynt c'est qu'il est un peu le reflet de notre humanité occidentale : ni héros ni salaud, il est ordinaire. C'est dans une fête foraine abandonnée que David choisit de situer l'action : le symbole fort d'un monde en décomposition, l'occident comme une fête qui s'est mal finie."
Pratique. Jeudi 15 et vendredi 16 novembre à 19 heures, samedi 17 novembre à 18 heures au Théâtre des arts à Rouen. 15/20€. cdn-normandierouen.fr
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