Qui de Patrice Clos, numéro un de la fédération des transports, Christian Grolier, patron de la fonction publique, ou Yves Veyrier, membre du bureau confédéral (direction) va devenir secrétaire général?
Difficile à dire. Les tractations se sont encore poursuivies mercredi jusqu'en fin de soirée, pendant et en marge du comité confédéral national (CCN), le "parlement" de FO, réuni sur deux jours au siège de la confédération, à Paris, pour élire son leader.
Selon des responsables, le match est serré entre MM. Veyrier et Grolier.
Yves Veyrier, 60 ans, se qualifie de "réformiste militant", comme Jean-Claude Mailly qui a fait en fin de mandat de la concertation un outil de négociation, quitte à irriter une large partie des militants.
Cet ingénieur des travaux de la météorologie, plus ancien membre du bureau confédéral (depuis 2004), est qualifié par ses détracteurs de "clone" de Jean-Claude Mailly, quand d'autres louent sa bonne connaissance du syndicat.
Patrice Clos - transporteur routier, 53 ans - et Christian Grolier, - fonctionnaire inspecteur du permis de conduire, 52 ans -, se situent dans la ligne "revendicative", prônant la mobilisation pour défendre les droits des salariés. Le premier est réputé anarchiste, quand le second serait proche des trotskistes, des penchants qu'ils réfutent.
La vision du syndicalisme de Christian Grolier? "S'occuper des intérêts des salariés et rien d'autre".
Patrice Clos, lui, réclame un audit financier. La semaine dernière, plusieurs articles de presse ont épinglé la confédération sur les rémunérations et notes de frais des dirigeants, alors qu'elle a essuyé un déficit de 632.000 euros en 2017, après un excédent d'un million un an plus tôt. Pour le moment, la direction promet un "état financier complet", ainsi qu'une remise à plat des règles de rémunération et des défraiements.
"Campagne de dénigrement"
Quel que soit le choix des cadres, l'élu aura pour lourde mission de remobiliser les troupes, bousculées par la révélation début octobre de l'existence d'un fichier où certains cadres étaient affublés de qualificatifs comme "niais" ou "complètement dingue". L'exhumation de ce document a entraîné la démission de Pascal Pavageau à peine six mois après son élection.
Mercredi, les cadres du CCN ont passé la journée à vider leur sac en tribune et à condamner ce fichier, mais les interventions étaient de bonne tenue, "sans invectives, ni insultes", selon un responsable sur place. Les dirigeants sont aussi contrariés de voir depuis sept semaines leurs querelles internes déballées sur la place publique, n'hésitant pas à parler de "campagne de dénigrement".
"Dans la période actuelle, il faudrait que FO lance une grande initiative sur les salaires et le pouvoir d'achat plutôt que de se déchirer", regrette Fabrice Lerestif, figure anarchiste et soutien de Patrice Clos, dont le syndicat a appelé à rejoindre les "gilets jaunes".
La troisième organisation syndicale française est restée sans porte-voix depuis le départ de son numéro un. Pourtant l'agenda social est chargé, avec la concertation sur la réforme des retraites, la négociation sur l'assurance chômage ou la mobilisation des "gilets jaunes".
Signe des crispations internes: la présence de trois candidats pour occuper la tête de la centrale, une première pour FO, dont les statuts ne prévoient rien en terme de second tour. Le bureau a donc décidé une élection à un tour, au risque de compliquer la tâche du futur secrétaire général s'il n'est pas élu par une majorité.
L'organisation n'a compté que deux cas où deux candidats s'étaient présentés pour devenir secrétaire général: en 1989, lorsque Marc Blondel (numéro un de FO de 1989 à 2004) l'avait emporté devant Claude Pitous, dauphin d'André Bergeron (numéro un de 1963 à 1989), puis en 1996, lorsque Marc Blondel a battu Jacques Mairé.
"En 1989, on a mis dix ans à s'en remettre. Tout le monde se regardait en chiens de faïence", s'inquiétait la semaine dernière un dirigeant.
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