Qu'ils soient libéraux ou salariés, les 660.000 infirmiers - des femmes à plus de 80% - étaient invités à cesser le travail par une dizaine d'organisations remontées contre le plan santé présenté en septembre par l'exécutif, "trop centré sur les médecins".
"C'est tout le contraire", s'est défendue la ministre de la Santé Agnès Buzyn sur France Inter: ce plan "décharge sur l'ensemble des professionnels de santé la responsabilité des prises en charge" des malades chroniques.
La ministre "ne mesure pas l'urgence de la situation", ont déploré dans un communiqué les syndicats à l'issue d'une rencontre avec l'un de ses "conseillers techniques", demandant "audience au président de la République".
Une centaine de personnes, en blouses blanches ou bleues, s'étaient rassemblée dès 14H00 à Paris devant le ministère. Elles étaient entre 250 et 300 à Rennes, 200 à Lille, autant à Lyon, environ 150 à Strasbourg, selon des journalistes de l'AFP, 300 à Toulouse, 200 à Marseille, une centaine à Rouen, 90 à Nantes et 50 à Orléans, selon des sources policières, une centaine à Nancy, selon la préfecture.
"Plan santé au bûcher" ont scandé les manifestants lillois, dont les pancartes clamaient "Ne bradez pas nos compétences". "Nous nous sentons sacrifiés, complètement oubliés (...) aussi bien en milieu hospitalier qu'à domicile", a déploré Sandra Dupuis, 41 ans et 20 ans de métier.
Dans son viseur, la création de 4.000 postes d'assistants médicaux, à mi-chemin entre le secrétariat et le métier d'aide-soignante, pour soulager les médecins. "On invente des nouveaux métiers" financés par la sécurité sociale "pour faire des choses qu'on fait déjà depuis de nombreuses années" alors que "nous, les libéraux, on reste avec des tarifs qui défient toute concurrence", s'est indignée Mme Dupuis.
"Chez nous les soldes, c'est toute l'année", a abondé, à Bordeaux, sa consœur Karine Sauvage. "On est les seuls (personnels de santé) à être sur le terrain 365 jours par an, sept jours sur sept, et les seuls à faire des actes non rémunérés".
Claire Pananceau, membre du syndicat Sniil (libéraux) venue des Ardennes à Paris, n'a ainsi rien touché pour la prise en charge, la veille, d'une dame de 87 ans victime d'un malaise. "Je suis passée la voir car le médecin n'était pas joignable entre midi et 14H00. Je l'ai appelé, il a réadapté son traitement puis je suis repassée la voir. C'est moi qui ai tout déclenché" mais ce travail n'est pas reconnu dans les grilles tarifaires, a-t-elle expliqué.
'1.600 euros par mois'
Cet été, les syndicat libéraux avaient quitté leurs négociations tarifaires avec l'Assurance maladie, jugeant ses propositions insuffisantes. Ces discussions reprendront "début décembre", selon Mme Buzyn.
Autre motif de mécontentement, la possibilité pour les pharmaciens de vacciner contre la grippe, expérimentée dans certains territoires et qui sera généralisée l'année prochaine.
Quant à la création d'un nouveau métier d'infirmier en pratique avancée (aux compétences élargies), elle ne concernera qu'une minorité de professionnelles maintenues "sous le joug du corps médical", selon Daniel Guillerm, du syndicat FNI (libéraux).
Chez les hospitaliers, "la souffrance" et la "perte de sens" au travail persistent, selon Nathalie Depoire, du syndicat CNI, et "les cas d'épuisements professionnels se multiplient".
"Il y a un manque d'effectifs dans beaucoup d'établissements et les heures supplémentaires s'accumulent en quantité non négligeable", a regretté Laurence Etter, élève en formation d'infirmière de bloc opératoire aux hôpitaux civils de Colmar.
"Une infirmière gagne 1.600 euros par mois en début de carrière et travaille un week-end sur deux", a rappelé Cathy Le Gac dont le syndicat, SUD-Santé, s'est greffé au rassemblement parisien, bien moins pourvu qu'en novembre 2016.
Cette année-là, des milliers d'infirmiers et aides-soignants avaient défilé partout en France au cours d'un mouvement unitaire inédit depuis 30 ans, auquel s'étaient joints les syndicats d'étudiants infirmiers et les grandes centrales comme FO ou la CGT, ce qui n'était pas le cas mardi.
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