Lundi soir, Christophe Castaner a appelé au respect du principe de la libre circulation et averti que les déblocages menés par les autorités allaient "se poursuivre dans les heures qui viennent". Il a demandé aux préfets et forces de l'ordre de "veiller à dégager systématiquement, mais méthodiquement, sans confrontation, les dépôts pétroliers et les sites sensibles".
Quelque 27.000 personnes ont participé lundi à des actions, selon un comptage du ministère, le seul disponible pour évaluer ce mouvement qui se veut apolitique et asyndical. Elles étaient 290.000 samedi. Les manifestations ont fait un mort et 528 blessés, dont 17 grièvement atteints, selon un bilan donné lundi soir par le ministre.
Un homme de 32 ans a été condamné à Strasbourg à quatre mois de prison ferme pour mise en danger de la vie d'autrui et entrave à la circulation. Samedi, il avait formé une chaîne humaine sur l'autoroute et traversé un terre-plein central avec quatre autres personnes.
La grogne pourrait se poursuivre dans les prochains jours: des appels à bloquer Paris samedi commençent à fleurir sur les réseaux sociaux, appelant parfois à un "Acte 2" du mouvement, qui a débuté le 17 novembre.
C'est ce jour-là que, selon Le Parisien, quatre hommes - mis en examen et placés en détention provisoire samedi dans le cadre d'une enquête antiterroriste - ont envisagé de mener une attaque terroriste dans le pays, en profitant de la mobilisation des forces de l'ordre sur les rassemblements des "gilets jaunes".
Lundi, alors que de nombreux points de rassemblements, péages, stations-service, entrées des autoroutes ou centres commerciaux, avaient été évacués dans la matinée par les autorités, certains "gilets jaunes" ont réinvesti les lieux dans l'après-midi, notamment au Pont d'Aquitaine, à Bordeaux.
"On a été chassés dimanche... On est revenus, on se refait chasser (lundi) mais c'est pas grave, on tiendra bon, on va encore revenir à la charge", assurait un manifestant.
A Vern-sur-Seiche près de Rennes, environ 150 "gilets jaunes" bloquaient un rond-point près d'un dépôt de carburant. "Nous allons rester toute la nuit ici et évacuer les lieux demain matin pour aller sur un autre point d'action", a indiqué Erwan, chaudronnier soudeur.
Vers 23h, les autoroutes A7, A8, A9, A10, A20, A28, A61, A62 et A71 connaissaient encore des perturbations ou des blocages et certains tronçons étaient fermés à la circulation après décision préfectorale, a indiqué Vinci Autoroutes dans un point de situation diffusé dans la nuit.
Plusieurs dépôts pétroliers sont par ailleurs désormais ciblés, notamment à Port-la-Nouvelle (Aude), Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), Frontignan (Hérault), Portes-lès-Valence (Drôme) et Valenciennes (Nord).
En Corse, le blocage du dépôt de Lucciana a entraîné une ruée des automobilistes dans les stations-services de la région bastiaise, qu'il approvisionne.
Des organisations patronales ont mis en garde contre "un blocage de l'économie".
Le chef de l'État Emmanuel Macron a déclaré à Bruxelles qu'il répondrait au mouvement "en temps voulu", arguant qu'il ne s'exprimait pas de l'étranger sur l'actualité française.
La veille, le Premier ministre Edouard Philippe a dit avoir entendu la "colère" et la "souffrance" des manifestants. Mais il a maintenu "le cap" de la politique économique du gouvernement, notamment sa volonté de taxer davantage la pollution.
Le mouvement, lancé sur les réseaux sociaux et qui n'a pas de leader connu, est soutenu par près des trois quarts des Français, selon plusieurs sondages. D'abord concentrés sur la hausse du prix des carburants, les motifs de griefs se sont ensuite élargis à une dénonciation plus globale en matière de taxation et de baisse du pouvoir d'achat.
Les opérations se sont poursuivies dans toutes les régions avec des "opérations escargot" ou des barrages filtrants.
Nouveaux accidents
En région Paca, quelque 680 tonnes de clémentines corses n'avaient pas pu être livrées et la récolte s'en trouvait suspendue "jusqu'à nouvel ordre" sur l'île de Beauté, selon Simon-Pierre Fazi, président de l'AOP Fruits de Corse.
A Lisieux, les forces de l'ordre ont utilisé des gaz lacrymogènes pour déloger près de 150 "gilets jaunes" qui bloquaient 200 poids lourds, selon la préfecture.
La journée a été marquée par de nouveaux accidents.
A Calais, un routier a tenté de forcer le passage d'un barrage, avant d'être pris en chasse par un motard de la police, qui a ensuite heurté une voiture. Un autre motard a été grièvement blessé par un automobiliste paniqué à l'approche d'un blocage à Colombelles, a tweeté la préfecture du Calvados.
Dans la Drôme, un motard qui avait pris la route à contresens avant l'arrivée d'un camion était entre la vie et la mort.
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