Face à un mouvement nouveau, protéiforme, émanant de collectifs de citoyens en colère contre les hausses de taxes sur les carburants, l'exécutif est sur ses gardes. Il avait déjà prévenu cette semaine, par la voix du ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, qu'il n'accepterait "aucun blocage total" samedi.
Quelque 1.500 actions sont attendues samedi dans l'ensemble du pays et seulement "un peu plus d'une centaine" auraient été déclarées, estimait jeudi une source policière.
"Nous serons très attentifs, très concentrés, très vigilants, pour faire en sorte que la liberté de manifester soit respectée, mais que la liberté de circulation soit garantie", a de nouveau assuré le Premier ministre vendredi, depuis l'autodrome de Linas-Montlhéry (Essonne), où il s'est rendu dans la matinée avec le ministre de la Transition écologique François de Rugy.
"On peut manifester, mais bloquer un pays, alors que des services d'urgence peuvent avoir besoin de circuler, alors que tout un chacun peut avoir besoin de circuler demain, n'est évidemment pas acceptable", a-t-il ajouté.
Mais depuis ce site, où est vérifiée la conformité des véhicules avec les normes européennes, notamment en matière de pollution, il a aussi tenté de poursuivre son travail de pédagogie.
Le gouvernement ne veut "pas piéger les Français" ou leur dire qu'ils n'ont qu'à "payer les conséquences" du choix de leur véhicule. Il veut "au contraire les accompagner", a-t-il insisté, deux jours après l'annonce de mesures de soutien : un chèque énergie élargi, et une "super prime" à la conversion des véhicules pouvant aller jusqu'à 4.000 euros pour les ménages les plus modestes.
Après application de cette surprime, une Nissan Micra d'occasion récente à Montlhéry coûte 5.490 euros, ou une Peugeot 107 avec un faible kilométrage dans les Hautes-Alpes 1.990 euros, a fait valoir François de Rugy, petites annonces réelles à l'appui.
"Différer les déplacements"
Cela suffira-t-il à désamorcer le mécontentement des "gilets jaunes", alors que le gouvernement maintient la taxe sur les carburants et une nouvelle hausse au 1er janvier ?
Les manifestants n'avaient clairement pas été convaincus par le mea culpa mercredi d'Emmanuel Macron, qui avait admis avoir échoué à "réconcilier le peuple français avec ses dirigeants".
Et malgré la baisse des prix à la pompe ces derniers jours, les "gilets jaunes" comptent toujours perturber ou bloquer samedi les accès aux villes, aux aéroports ou aux dépôts de carburant, ainsi que les grands axes routiers. Une opération escargot doit également se déployer sur le périphérique parisien, avant de rejoindre l'Elysée.
Vendredi matin, plusieurs dépôts de carburants étaient bloqués en Belgique, mais aucune perturbation n'était encore constatée sur les routes.
Face à l'incertitude, la société d'autoroutes Sanef a "invité ses clients à différer ou à éviter leurs déplacements" et va "renforcer" ses équipes, tandis qu'à Limoges, les transports en commun de la métropole "ne seront pas assurés" pour éviter les "risques importants de blocage de la circulation".
Le distributeur Carrefour va aussi suivre de près "l'impact du mouvement sur l'accès" à ses magasins et promet "un dispositif d'information par sms et mail" de ses clients "en temps réel".
Déstabilisés par la spontanéité du mouvement, les responsables politiques ont pour un grand nombre marqué leur soutien au mouvement, provoquant la critique du gouvernement, qui les accuse de "récupération".
Mais tous ne participeront pas aux manifestations. Le chef de file de La France Insoumise Jean-Luc Mélenchon et le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan seront aux côtés des manifestants, comme certains élus RN, mais pas leur présidente Marine Le Pen.
Le premier secrétaire national du PS Olivier Faure non plus, même s'il veut en profiter pour "aller à la rencontre" des Français.
Car l'exercice est compliqué pour la gauche et les écologistes, qui ont fait des propositions pour défendre à la fois pouvoir d'achat et transition écologique.
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