Ce qui est frappant avec Vanessa Paradis, c'est l'impression de l'avoir toujours connue. Enfant, lors de sa première apparition télévisée à "L'école des fans", où elle interpréta "Emilie Jolie" sous les yeux déjà conquis de Jacques Martin et de la France en 1981.
Adolescente, lorsqu'elle fit une entrée fracassante dans le Top 50 avec "Joe le Taxi" en 1987. Jeune adulte, quand elle confirma ses talents d'actrice dans "Elisa" face à Gérard Depardieu en 1995, cinq ans après reçu le César du meilleur espoir féminin pour "Noces blanches". Mère pour la deuxième fois, quand "Divinidylle" devint en 2007 son album le plus vendu en France...
Autant de marqueurs importants, pour celle dont la vie sentimentale n'aura été par ailleurs un secret pour personne, qui illustrent à quel point, depuis trente ans, elle mène avec réussite ses deux carrières, musicale et cinématographique.
Cinq ans séparent "Love Songs", produit et réalisé par Benjamin Biolay, de ce 7e opus intitulé "Les sources" pour lequel elle a fait appel au Britannique Paul Butler. Le leader du groupe The Bees a eu pour mission d'habiller ses compositions avec des arrangements de cordes et de cuivres que chérit tant sa commanditaire.
"Paul a un talent époustouflant, c'est un instrumentiste incroyable, c'est lui tout seul qui joue les cuivres sur l'album", dit-elle les yeux grand ouverts pleins d'admiration.
Pour guider Butler, Vanessa Paradis avait préparé une playlist. "On a passé une journée entière à l'écouter et à disséquer ce que je cherchais dans chaque chanson. Il y avait beaucoup d'Américains (Aretha Franklin, Marvin Gaye, Al Green, Curtis Mayfield) mais aussi des Français comme Serge Gainsbourg et Jacques Dutronc dans leur période pop 60's", affirme celle qui a contracté ado le virus funk-soul avec Prince.
Kiev, Rome, Ipanema
En résulte un album soigné, lumineux, tantôt festif, tantôt apaisant, qui oscille entre chanson, folk, pop et bossa-nova, où il est essentiellement question d'amour, le thème de prédilection de son interprète qui a confié les paroles à son mari, l'écrivain et réalisateur Samuel Benchetrit, ainsi qu'à Adrien Gallo (leader des BB Brunes) et à l'écrivain et peintre Fabio Viscogliosi.
"J'ai fait appel à ces auteurs pour leur style, sans donner de consigne. Outre le fait qu'ils me connaissent très bien, il y a par exemple une grande sophistication dans la poésie de Samuel", estime Vanessa Paradis pour qui "les plus belles choses sont souvent dites de la manière la plus simple".
"Ces mots simples", s'inscrit dans ce cadre épuré. Ce premier single est un des six titres écrits par Benchetrit, tout comme "Kiev", sommet du disque dès le début de parcours, étroitement lié au film "Frost" de Sarunas Bartas, où elle tient un rôle secondaire (2017).
"Elle a été écrite pendant le tournage en Ukraine. Ça raconte l'histoire d'amour, dans un pays en guerre, d'un couple qui ne vit pas ensemble. Imbriquer ces deux choses était une idée forte qui m'a beaucoup plu", souligne-t-elle.
De Kiev à Paris, en passant par Los Angeles, où s'est fabriqué l'album, par Rome, traversé dans "Mio Cuore" qu'elle chante en italien, ou par Ipanema, dont on devine la saudade sur "On oubliera", "Dans notre monde" et "Chéri", l'invitation au voyage est permanente. Et "rêve" est le mot le plus employé.
Justement, est-elle devenue l'artiste qu'elle rêvait d'être? "Je ne sais pas. Je n'ai pas eu le temps de rêver aussi loin, parce que j'ai commencé à travailler très tôt. Mais je n'aurais pas pu imaginer tout ce qui s'est passé, j'aurais été trop gourmande si j'avais rêvé de tout ce que j'ai eu dans ma vie".
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