"Il y a un décalage de quatre mois et demi ou cinq mois (par rapport au calendrier initial) en raison de l'encombrement du calendrier parlementaire", a indiqué jeudi à l'AFP le rapporteur de la mission d'information sur la bioéthique, Jean-Louis Touraine, député LREM.
"Une stratégie électorale avant l'intérêt des familles", a sèchement dénoncé le président de SOS homophobie Joël Deumier. Celui-ci y voit une manière d'éviter des débats polémiques avant les élections européennes de mai, alors que l'exécutif accuse depuis plusieurs semaines une baisse continue de popularité.
Le ministère de la Santé a pour sa part indiqué à l'AFP que "l'objectif est de présenter le projet de loi au premier trimestre, quitte à ce que le débat ait lieu plus tard pour des raisons de calendrier".
Initialement, le gouvernement avait annoncé qu'il présenterait le projet de loi sur la bioéthique avant la fin de l'année, en vue d'un débat au Parlement au premier trimestre 2019.
Marqueur de la jambe gauche de l'axiome "et en même temps" macroniste, l'ouverture de la PMA à toutes les femmes figurait dans le programme du candidat Macron, qui l'avait toutefois conditionné à un avis favorable du Comité consultatif national d'éthique.
Ce dernier obtenu, ainsi que celui de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, le débat avait glissé sur le terrain politique.
Édouard Philippe avait alors donné le "la": "On peut y aller", avait-il encouragé fin septembre dans L'Émission politique, en se disant "à titre personnel (...) plutôt favorable".
La précaution sémantique rappelait la prudence extrême avec laquelle l'exécutif entendait traiter un sujet jugé sensible, cinq ans après les débats tendus autour de l'ouverture du mariage aux couples de même sexe.
"Il faut créer les conditions pour un débat le plus apaisé possible, pour un projet de loi aux enjeux complexes, dont la PMA n'est pas le plus difficile", a rappelé jeudi l'entourage de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, citant "la congélation des ovocytes, les recherches sur l'embryon, le droit de la filiation".
"On souhaiterait que l'examen soit précédé d'un travail en commun entre les députés et les sénateurs", ont encore commenté les proches de Mme Buzyn.
"Reculade"
Mais l'annonce a été sévèrement reçue par les associations LGBT (lesbiennes, gays, bi, trans). "Nous sommes furieux", a tonné auprès de l'AFP Laurène Chesnel, déléguée Famille de l'Inter-LGBT, lesbienne et mère de deux filles nées par PMA, ajoutant : "on nous fait passer après la réforme constitutionnelle". "Ce n'est pas à nous de payer l'affaire Benalla!", qui avait entraîné le report de ladite réforme, a-t-elle rappelé.
Gaylib, l'association des LGBT de centre droit, rattachée au Mouvement radical, a pour sa part dénoncé auprès de l'AFP "une nouvelle reculade".
Sur le terrain politique, après un flottement certain sur le sujet, la droite s'est mise en ordre ces derniers jours pour batailler contre le projet.
L'extension de la PMA "ouvre la voie à des dérives", a estimé début novembre le président des Républicains Laurent Wauquiez, dans une tribune qui se voulait la ligne officielle du parti.
A contrario, la gauche s'était emparée du débat pour tenter de presser le gouvernement, voire le prendre de court. Lundi, les députés de La France Insoumise avaient déposé une proposition de loi pour un droit universel à la PMA.
Chez les députés de La République en Marche, la question fait pourtant quasiment consensus, à l'exception notable d'une élue de l'Oise, Agnès Thill, recadrée depuis par ses collègues.
La procréation médicalement assistée, ou l'insémination artificielle par don de gamètes anonyme, est aujourd'hui autorisée pour les couples de sexes différents infertiles ou risquant de transmettre une maladie à l'enfant. Le projet prévoit de l'ouvrir aux couples de femmes, ainsi qu'aux célibataires.
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