Un premier train de mesures punitives, levées en échange de l'engagement pris en 2015 par l'Iran auprès des grandes puissances de ne pas se doter de la bombe atomique, avait été à nouveau imposé en août.
Comme promis --et malgré les protestations des dirigeants iraniens, des alliés européens de Washington, ainsi que de la Chine et de la Russie-- le second volet entre en vigueur lundi. Il s'agit de sanctionner, en leur barrant l'accès au marché américain, tous les pays, entités ou entreprises étrangères qui continueront d'acheter du pétrole iranien ou d'échanger avec les banques de la République islamique.
Huit pays bénéficieront toutefois de dérogations et seront autorisés temporairement à continuer d'acheter du pétrole iranien, "mais uniquement car ils ont fait preuve d'efforts importants pour ramener leurs importations de brut vers zéro", a annoncé vendredi le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo.
La liste de ces pays sera connue lundi, le secrétaire d'Etat ayant seulement dit qu'aucun membre de l'Union européenne n'en faisait partie. Les observateurs s'attendent à ce que des dérogations soient notamment octroyées à la Corée du Sud, l'Inde, voire la Turquie ou même la Chine.
Stratégie nord-coréenne
L'administration Trump, qui a promis les sanctions "les plus fortes de l'histoire" --d'autres mesures punitives devraient suivre dans les prochains mois-- a assuré que leur mise en oeuvre serait beaucoup plus agressive que par le passé.
Pour preuve, Mike Pompeo a expliqué que l'ex-président démocrate Barack Obama avait octroyé beaucoup plus de dérogations sur les ventes de pétrole (une vingtaine). Et le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin a fait savoir que 700 personnes ou entités seraient ajoutées à la liste noire américaine, soit 300 de plus que celles qui en avaient été retirées après 2015.
Il a aussi dit que les Etats-Unis souhaitaient couper les institutions financières iraniennes frappées par des sanctions, dont la liste sera également publiée lundi, du circuit bancaire international Swift, hormis pour les "transactions humanitaires".
"Les sanctions vont faire mal", prédit un diplomate européen, alors que l'Iran, son économie et notamment le rial, sa monnaie, souffrent déjà depuis plusieurs mois. Selon lui, "c'est le même plan de bataille qu'avec Kim Jong Un et la Corée du Nord: sanctions, pression maximale et ensuite ils sont prêts à négocier".
L'administration Trump ne cache pas qu'elle pense pouvoir reproduire cette stratégie qu'elle juge couronnée de succès, l'homme fort de Pyongyang s'étant engagé en faveur d'une "dénucléarisation" lors d'un sommet historique avec le président américain après des mois d'escalade et de renforcement des sanctions internationales.
Le milliardaire républicain répète qu'il est prêt à rencontrer les dirigeants de la République islamique pour négocier un accord global sur la base de 12 conditions énoncées par les Etats-Unis: des restrictions beaucoup plus fermes et durables sur le nucléaire que le texte de 2015, jugé laxiste par Washington, mais également la fin de la prolifération de missiles balistiques et des activités jugées "déstabilisatrices" de Téhéran dans les pays voisins (Syrie, Yémen, Liban...).
"C'est un voeu pieux", dit à l'AFP Ali Vaez, de l'International Crisis Group. "Malgré la pression économique, les Iraniens ont pu continuer à soutenir leurs alliés régionaux pendant 40 ans", depuis la révolution islamique de 1979, souligne-t-il.
Flou sur les intentions
D'autant que la situation est différente aujourd'hui par rapport à 2012, quand Barack Obama avait imposé les sanctions qui seront rétablies lundi.
"Nous ne sommes pas en 2012 quand le monde était uni derrière les sanctions contre l'Iran", explique Barbara Slavin, du cercle de réflexion Atlantic Council. "Cette fois, il s'agit de l'administration Trump qui tente d'imposer au reste du monde une politique dont la plupart des pays ne veulent pas."
L'UE est ainsi déterminée à aider l'Iran à engranger quelques bénéfices économiques de son adhésion à l'accord de 2015, pour éviter qu'il le quitte à son tour et relance la course à l'armement nucléaire.
Au-delà du niveau de pression que les Américains réussiront à exercer, le flou demeure surtout sur leurs vraies intentions.
Pour Barbara Slavin, "ils mettent la pression juste pour mettre la pression, ils n'aiment pas l'Iran et c'est tout". Selon Ali Vaez, certains dans l'administration cherchent davantage à "aboutir à un changement de régime à Téhéran".
Quoi qu'il en soit, cette stratégie est encore compliquée par le récent refroidissement des relations avec l'Arabie saoudite à la suite du meurtre du journaliste Jamal Khashoggi. Ryad est un allié-clé de Washington, qui espérait mettre en place une Alliance stratégique du Moyen-Orient, réunissant les pays arabes du Golfe, l'Egypte et la Jordanie pour contrer l'Iran chiite.
"Ce projet est mort en même temps que Jamal Khashoggi", lâche l'experte de l'Atlantic Council.
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