Mme Fujimori, 43 ans, a été placée en détention préventive pour une durée de 36 mois sur demande d'un procureur anticorruption, et en raison d'"un danger élevé de fuite" de sa part, a annoncé le juge Richard Concepción Carhuancho.
Il a estimé qu'existait le "soupçon grave" que Keiko Fujimori soit la dirigeante d'une "organisation criminelle de fait qui s'est enkystée dans le parti" fujimoriste, qui blanchissait de l'argent d'origine illégale.
Elle risque désormais 20 ans de prison, accusée d'avoir reçu de manière illicite 1,2 million de dollars (1,05 million d'euros) pour sa campagne électorale de 2011 de la part d'Odebrecht, le géant brésilien du BTP qui a versé des pots-de-vin pour obtenir des chantiers en Amérique latine.
Cette candidate aux élections présidentielles de 2011 et 2016, battue chaque fois de justesse au second tour, retourne à la case prison, où elle avait séjourné pendant une semaine à la mi-octobre.
Keiko Fujimori est la cheffe de l'opposition au président Martin Vizcarra: son parti Fuerza Popular (droite populiste) dispose de la majorité absolue des sièges au Congrès. Depuis le début de l'année, elle est à couteaux tirés avec son frère Kenji (38 ans) pour le contrôle du parti.
Selon le juge Carhuancho, elle était à la tête d'une "organisation criminelle" de 13 personnes et tirait les ficelles du Congrès. L'objectif de cette organisation était "d'accéder au pouvoir politique et une fois au pouvoir, de commettre des délits de corruption", a pointé le magistrat.
L'audience a duré plusieurs jours et a été retransmise à la télévision, à la radio et sur les réseaux sociaux, suivie par les Péruviens comme un reality show.
Comme son père
La lecture de la décision de justice a duré huit heures, durant lesquelles Keiko Fujimori, vêtue de noir, ne cessait de cligner des yeux nerveusement. A l'issue de la sentence, elle a été emmenée sous bonne escorte dans la cellule du palais de justice, où elle devait passer sa première nuit comme détenue, avant d'être transférée dans une prison de femmes.
Auparavant, elle a pu embrasser son mari, Mark Vito Villanella, en larmes. "C'est un lynchage politique", a-t-il réagi devant la presse.
L'avocate de "Keiko", comme on l'appelle au Pérou, a annoncé qu'elle ferait appel. "Nous allons présenter l'appel par écrit la semaine prochaine", a dit Giuliana Loza, sachant que ces jeudi et vendredi sont fériés.
Les seuls politiques qui avaient jusqu'alors été incarcérés dans l'affaire Odebrecht étaient l'ex-président Ollanta Humala (2011-2016) et son épouse Nadine, détenus neuf mois et libérés en juin dernier.
"Keiko" suit ainsi les traces de son père: Alberto Fujimori, président du Pérou de 1990 à 2000, a passé 12 ans derrière les barreaux, pour crimes contre l'humanité et corruption, après une fuite au Japon dont il est originaire.
Sa grâce, prononcée en décembre 2017 par l'ex-président Pedro Pablo Kuczynski, a été révoquée début octobre par la Cour suprême. L'ex-chef de l'Etat, âgé de 80 ans, est depuis hospitalisé dans une clinique de Lima sous surveillance policière, et considéré comme un détenu par la justice.
Alberto Fujimori a conservé une certaine popularité pour avoir mis fin à la guérilla maoïste du Sentier lumineux et à l'hyperinflation.
Son aînée, dont le prénom signifie "fille bénie" en japonais, a pu surfer sur cette popularité, passant plus de la moitié de sa vie dans le combat politique.
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