"Jamais un gouvernement n'a fait autant d'efforts que le nôtre pour l'hébergement d'urgence", affirme le ministre du Logement Julien Denormandie dans entretien au Parisien paru mercredi.
En plus des 136.000 places d'hébergement d'urgence déjà existantes pendant l'année, l'Etat ouvrira 14.000 places en cas de grand froid, mobilisables à partir de jeudi et jusqu'au 31 mars, détaille le ministre. Un dispositif d'ampleur similaire à celui de l'année passée.
"Vous avez encore des milliers de gens qui dorment dans la rue et, tant qu'il y aura une personne dans cette situation, c'est que le travail engagé doit être poursuivi", a expliqué M. Denormandie.
La promesse d'Emmanuel Macron, qui ne voulait plus de sans-abri dans les rues à la fin 2017, reste donc loin d'être tenue. Mais M. Denormandie insiste : "Nous ne dévions pas de cap, mais ça ne se fera pas en un hiver car la situation est difficile".
Le gouvernement prévoit aussi d'investir cinq millions d'euros pour augmenter le nombre de maraudes, essentielles pour approcher nombre de SDF qui n'appellent pas le 115 et ne sollicitent jamais d'hébergement d'urgence.
Dispositif "sous-dimensionné"
Face à ce plan, les associations d'aide aux sans-abri ne sont qu'à demi-convaincues.
"Le dispositif est encore sous-dimensionné" estime Eric Pliez, président du Samu social de Paris. "Renforcer les maraudes, c'est une bonne démarche": dans la rue, une majorité de SDF n'appellent pas le 115.
Mais s'ils entrent en hébergement d'urgence, comment gérer ce nouveau public avec un nombre de places égal à l'an dernier? "Ca va mettre tout le monde au pied du mur", craint-il. D'autant que le Samu social constate "une demande accrue de la part des familles avec enfants".
M. Denormandie en fait d'ailleurs sa "priorité absolue". "C'était inconcevable il y a quelques années, mais aujourd'hui des femmes et des enfants dorment dehors", a déploré le ministre dans le Parisien.
A la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), qui rassemble 800 associations gérant 80 % des centres d'hébergement, on salue une "mobilisation de l'Etat plus précoce que les années passées".
Mais "il faut sortir de la gestion au thermomètre: l'été, il y a autant de demandes d'hébergement et la mortalité des sans-abri est aussi importante qu'en hiver", martèle son directeur Florent Gueguen.
En fin d'hiver dernier, le gouvernement avait décidé de pérenniser 5.000 places temporaires du plan grand froid. Malgré cela, 36% des pensionnaires de l'hébergement d'hiver ont été remis à la rue au printemps, selon M. Gueguen.
Pour 2019, "il n'y a aucun engagement du ministre pour pérenniser des places et la loi de finances ne prévoit pas les crédits pour le faire", regrette-t-il.
Logement d'abord
Derrière les moyens affichés, il dénonce "la baisse des crédits pour les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS): 33 millions en deux ans".
Ces CHRS accueillent des publics spécifiques - femmes victimes de violence, sans-abri sortis de prison - et accompagnent davantage vers un logement durable. "On fait des économies sur l'hébergement digne et qualitatif, au profit de la mise à l'abri précaire", juge M. Gueguen.
Le gouvernement insiste pourtant sur ses efforts pour mieux accompagner les plus précaires vers le logement.
M. Denormandie veut notamment cibler ses efforts sur les familles hébergées en hôtel, pour certaines "depuis dix ans". "Maintenant il faut aider ces familles à accéder à un logement permanent", affirme le ministre, en annonçant une enveloppe de 5 millions d'euros pour y parvenir.
Si elles saluent la démarche, les associations attendent des résultats. A la fin de l'hiver dernier, seuls 7% des pensionnaires de l'hébergement d'hiver ont réussi à obtenir une place en logement très social (pensions de famille, résidences sociales...), selon la FAS.
"On est très loin de la doctrine du logement d'abord", remarque M. Gueguen.
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