Drapeaux en berne dans le pays, veillées d'hommage à Pittsburgh et ailleurs, messages de solidarité: tout le pays manifestait son émotion alors que l'identité des victimes a été révélée lors d'une conférence de presse dans cette grande ville industrielle de Pennsylvanie.
Trois femmes et huit hommes, âgés de 54 à 97 ans, ont succombé sous les balles de Robert Bowers, arrêté à l'issue de sa virée meurtrière.
Parmi les victimes se trouvaient deux frères, ainsi qu'un couple de fidèles octogénaires, ont précisé les autorités, qui espèrent pouvoir rendre certains corps à leur famille dès dimanche. Six personnes ont également été blessées dans la fusillade.
Preuve de l'ampleur du drame: il faudra une semaine pour examiner et nettoyer la scène du crime.
Robert Bowers, armé de trois pistolets Glock et d'un fusil d'assaut semi-automatique AR-15, a semé la mort dans trois endroits distincts de la synagogue "Tree of Life", qui abritait plusieurs offices religieux en ce jour de chabbat, le repos hebdomadaire juif.
Lors de son attaque, cet homme de 46 ans, auteur de nombreux messages antisémites sur les réseaux sociaux, a "fait des déclarations au sujet du génocide et de son désir de tuer des juifs", a déclaré le procureur Scott Brady. Selon plusieurs médias, il a crié: "tous les juifs doivent mourir".
Arrêté après un échange de tirs avec des policiers, dont quatre ont été blessés, il a dû être opéré et restait hospitalisé dimanche dans un état stable.
Inculpé de 29 chefs d'accusation, il sera jugé au niveau fédéral et encourt la peine de mort.
"Le coeur brisé"
Au lendemain de l'attaque, le quartier de Squirrel Hill, coeur de la communauté juive de Pittsburgh, était totalement abasourdi.
Comme chaque dimanche, Alyia Paulding, 37 ans, est venue vendre ses savons sur un petit marché. Mais cette fois, elle confie avec émotion avoir "le coeur brisé". "Aujourd'hui, le marché est bien silencieux, tout le quartier semble éteint..."
Le maire, Bill Peduto a toutefois affirmé sa confiance en l'avenir. "Nous savons que la haine ne l'emportera jamais, que ceux qui essaient de nous diviser à cause de la façon dont nous prions ou de l'origine de nos familles dans le monde vont perdre."
L'élu démocrate a également relancé l'épineux débat sur les armes à feu, alors que les fusillades endeuillent régulièrement les Etats-Unis.
"J'ai entendu le président dire qu'il faudrait armer des gardes dans nos synagogues", a-t-il déclaré. "Notre approche devrait plutôt être: comment retirer les armes à feu - qui sont le dénominateur commun de toutes les fusillades en Amérique - des mains de ceux qui veulent exprimer leur haine raciste avec des meurtres ?"
"Antisémitisme normalisé"
Donald Trump a fermement condamné la tuerie, "une chose terrible". En meeting samedi soir, il a a appelé les Américains à se tenir aux côtés de leurs "frères et soeurs juifs pour vaincre l'antisémitisme et les forces de la haine".
Il a toutefois estimé que la fusillade était l'oeuvre d'un "cinglé" et qu'il ne fallait pas changer "nos vies ou nos emplois du temps".
Mais pour l'Anti-Defamation League, la principale organisation de lutte contre l'antisémitisme aux Etats-Unis, la tuerie s'inscrit dans un contexte global délétère.
"Nous sommes à un moment où l'antisémitisme est presque normalisé", a déploré sur la chaîne NBC son directeur Jonathan Greenblatt, en rappelant avoir enregistré une hausse de 57% des actes antisémites (menaces, violences, insultes...) en 2017 dans le pays.
Pour lui, certaines personnalités politiques ont contribué à banaliser le discours antisémite, à commencer par le président Trump "qui a utilisé la rhétorique des suprématistes blancs".
Plus globalement, de nombreuses voix ont déploré une détérioration du débat public à l'approche des élections législatives du 6 novembre et craignent que les attaques verbales entre candidats n'encouragent le passage à l'acte de personnes dérangées.
Un homme a ainsi envoyé des engins piégés la semaine dernière à une dizaine de personnalités démocrates ou détracteurs du président républicains.
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