Augmentation du bio, du bien-être animal, accent sur l'élevage extensif et herbager, développement du steak haché haut de gamme ou de viandes maturées: le Salon international de l'alimentation (Sial), qui a ouvert dimanche à Villepinte (Seine-Saint-Denis), met l'accent sur les efforts mis en œuvre pour permettre aux carnivores de manger mieux. Même s'ils mangent moins.
Le recul de consommation touche surtout la viande bovine. En cinq ans, elle a baissé de 6,5%, chaque Français ne consommant plus que 22,8 kilos de steaks et de pot-au-feu par an en 2017 contre 24,4 kilos en 2012, selon les statistiques de l'Institut de l'Élevage (Idele).
La consommation de mouton a très légèrement ralenti, à 2,4 kilos par an et par personne contre 2,8 cinq ans avant. Celle de porc s'est maintenue à 33 kilos et celle de volaille a augmenté à 27,8 kilos contre 26, selon la même source.
En 2015, l'annonce par l'Organisation mondiale de la Santé que les viandes rouges sont "probablement cancérogènes", a créé l'émoi en France, premier producteur européen de viande bovine - le secteur de la viande y emploie globalement quelque 500.000 personnes.
L'élevage étant jugé responsable de 14,5% des émissions de gaz à effet de serre et les émissions provenant pour plus des trois quarts des ruminants, cela a accéléré le désamour.
L'émergence des mouvements "vegans" ou carrément anti-viande et anti-élevage, au nom de la défense des animaux, a encore augmenté le désarroi des éleveurs, par ailleurs sous pression en raison de la baisse des cours mondiaux et de l'intensification de la concurrence avec le Brésil et l'Amérique latine, sur fonds de négociations commerciales internationales entre l'UE et le Mercosur.
"moments un peu compliqués"
Mais dans une filière française écartelée entre ses 36.880 éleveurs de bovins à viande, un acteur dominant dans le secteur de l'abattage (Bigard) et une constellation de PME liées à la transformation (plats cuisinés, surgelés, salaisons...), difficile de faire émerger de nouvelles tendances.
Les bouchers ont été les premiers à réagir, autour de quelques stars comme Hugo Desnoyers ou Yves-Marie le Bourdonnec, travaillant avec les éleveurs pour remettre au goût du jour les bêtes de race et les viandes maturées.
Les vidéos du boucher turc Nusret Gökce, connu sur les réseaux sociaux par son surnom de Salt Bae, sont devenues virales, surtout pour sa façon théâtrale de jeter le gros sel sur une côte de bœuf.
"Le marché de la viande vit des moments un peu compliqués", reconnaît Hervé Puygrenier, qui dirige un abattoir dans l'Allier, spécialiste des viandes maturées et de qualité.
En laissant rassir les viandes plusieurs jours après avoir abattu l'animal, la texture s'attendrit et le goût s'améliore. Le minimum de maturation pour une viande de bœuf est de dix jours.
Cette viande gastronomique, lancée par les bouchers stars, faisait figure de nouveauté au Sial 2016, et sera une des vedettes de l'édition 2018.
La filière bovine française, dont 15% de la production est exportée, parie aussi sur le Sial pour promouvoir le "french beef, a taste of terroirs", son nouveau slogan en anglais dans le texte.
"La société va vers moins et mieux consommer, on n'a plus le droit de décevoir le consommateur. Il faut travailler des morceaux bien affinés, le consommateur est demandeur. Lorsque je reçois des clients japonais, je les emmène dans les prairies pour leur montrer notre style d'élevage", explique M. Puygrenier.
Une autre innovation porte d'ailleurs sur la promotion de l'herbe et de l'élevage extensif. A l'image de l'Irlande, les éleveurs et professionnels de la viande de 22 départements du Massif Central doivent lancer début 2019 une nouvelle marque de viande environnementale et équitable.
Son nom, "1886," correspond à l'altitude du Puy de Sancy, point culminant du Massif Central.
Le cahier des charges prévoit que les éleveurs aient au moins 70% de prairie, qu'ils n'exploitent pas plus de 100 animaux par humain installé sur l'exploitation, que l'alimentation se fasse sans supplément OGM, et que le pâturage des animaux soit obligatoire.
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