Le tribunal a jugé les torts partagés, comme le procureur qui, en septembre, avait requis un peu moins, un an avec sursis, contre ces "petits bourgeois du clash". Il avait estimé ces "pères de famille" et "chefs d'entreprise" responsables d'avoir perdu "toute lucidité" et entraîné leurs gardes rapprochées dans la bagarre le 1er août.
Leurs proches, jugés en même temps pour cette rixe ayant impliqué onze personne sous les yeux éberlués des voyageurs, certains filmant la scène, ont écopé de peines allant jusqu'à douze mois de prison avec sursis.
La scène de la rencontre en plein aéroport de Booba, 41 ans, et Kaaris, 38 ans, brouillés depuis des années, avait tourné sur les réseaux sociaux et les chaînes d'information au fil des différents rebondissements : interpellation à l'aéroport, envoi en détention provisoire puis remise en liberté trois semaines plus tard, et enfin explications devant le tribunal le 6 septembre.
Les avocats des rappeurs ont semblé plutôt satisfaits de la décision du tribunal : un jugement "en grande partie mesuré", qui "consacre des violences croisées", pour l'avocat de Booba, Yann Le Bras, "d'apaisement" pour celui de Kaaris, David-Olivier Kaminski.
En septembre, pendant les longues heures d'une audience qui s'était étirée jusqu'à deux heures du matin, les rappeurs s'étaient une fois encore excusés, une fois encore rejeté la faute, mais avaient laissé au soin de leurs avocats de s'écharper lors du visionnage des vidéos pour tenter d'imposer leurs vérités.
Dommages et intérêts
Les images de coups de poings, de pieds, de mini courses-poursuites au milieu des passagers éberlués, ne favorisent aucun camp : Booba, flacon de parfum au poing, frappe un proche de Kaaris. Kaaris, abrité derrière un rayon d'une boutique duty-free, jette des objets sur un proche de Booba...
Au final, des blessés légers dans chaque camp, plusieurs vols retardés et plus de 50.000 euros de casse. Une audience a été fixée au 17 janvier pour déterminer les dommages et intérêts.
"N'y avait-il pas moyen que cela se termine autrement ?", avait soupiré la juge pendant le procès.
"Je me suis défendu, tout simplement", avait répondu Booba. "C'est vraiment pas ma faute", avait dit Kaaris.
En garde à vue à Orly, Booba, "duc de Boulogne autroproclamé" et "patron" du rap français depuis 20 ans, et Kaaris, son ex-protégé et poids lourd du rap dit "hardcore" jusqu'alors peu connu du grand public, étaient revenus sur l'origine de leurs différends.
Depuis leur collaboration sur le titre "Kalash" en 2012 ayant propulsé Kaaris jusqu'aux premiers affronts de ce dernier qui a voulu "détrôner le roi" Booba, ils ont raconté des années de "clash" sur les réseaux sociaux, sous forme de piques, vidéos menaçantes et photos-montages moqueurs.
Dans ce contexte, "baisser les yeux, détourner le regard, ignorer l'autre, c'est déjà perdre la face", avait analysé le procureur en septembre.
Selon lui, la rencontre entre les deux rappeurs qui devaient embarquer sur le même vol pour Barcelone, était "fortuite", mais "ne pouvait que se conclure par une confrontation physique" : à force de "clashs" publics, Booba et Kaaris "se sont créé des personnages forts, puissants, violents, excessifs et déterminés".
Ni "guet-apens" ni "coup marketing" selon lui, l'affaire a fait une belle publicité aux deux rappeurs, qui n'ont pas hésité à en profiter : presque en même temps ces derniers jours, ils ont tous deux sorti un nouveau "single".
Rentré chez lui à Miami après le procès et la levée de l'interdiction de quitter le territoire, Booba est de retour en France, et répète pour son concert prévu le 13 octobre à la U-Arena de Nanterre, la plus grande salle d'Europe.
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