Depuis des semaines, tous les sondages prédisent la qualification dans un fauteuil pour le 2e tour du 28 octobre du député de 63 ans, sous les couleurs du petit Parti social libéral (PSL). Crédité jusqu'alors de quelque 32% d'intentions de vote, Jair Bolsonaro progresse de trois points dans un sondage publié jeudi (35%).
Si les sondages sont plus fiables que lors des dernières élections, le candidat de gauche Fernando Haddad, 55 ans, du Parti des Travailleurs (PT) devrait arriver en 2e position (à 22% dans le dernier sondage de jeudi), quatre semaines seulement après avoir remplacé l'ex-président Lula, inéligible car emprisonné pour corruption.
Bolsonaro, grièvement blessé dans un attentat en pleine campagne, martèle qu'il sera élu dès le 1er tour, une option que certains analystes n'excluent plus, sans toutefois la juger très probable.
Si la présidentielle peut faire basculer le Brésil dans une ère inconnue, les élections des gouverneurs et des assemblées des 27 Etats, des 513 députés de la Chambre basse et des deux tiers des 81 sénateurs également prévues dimanche ne devraient en revanche pas transformer radicalement le paysage politique.
Le président qui succèdera au 1er janvier, pour quatre ans, au conservateur Michel Temer aura une tâche colossale pour extraire le plus grand pays d'Amérique latine du marasme.
Flambée de la violence qui a fait plus de morts en sept ans que dans la Syrie en guerre, économie en berne avec 13 millions de chômeurs, creusement des déficits comme des inégalités, discrédit des élites politiques et persistance de la corruption rongent le Brésil.
"Je n'ai jamais vu un scrutin aussi polarisé", estime Geraldo Monteiro, analyste à l'Université de l'Etat de Rio de Janeiro, à propos de la présidentielle. "Il n'y a pas eu de vrai débat d'idées".
Virulent sentiment anti-PT
Bolsonaro place "Dieu au-dessus de tous". Il compte endiguer la violence par une libéralisation du port d'arme et des exécutions extra-judiciaires de "bandits" par la police. Il veut nettoyer le pays de ses "élites corrompues", nommer six généraux ministres et booster l'économie avec un programme ultra-libéral. Il est contre l'avortement et l'égalité des salaires hommes-femmes.
Epargné par les scandales de corruption, il tire sa force, décuplée par les réseaux sociaux, de sa posture antisystème -- alors qu'il est député depuis 27 ans-- et d'un virulent sentiment anti-PT.
"Ce vote pro-Bolsonaro que vous trouverez dans chaque classe sociale est un vote de rejet de la politique institutionnelle", estime Joao Feres, politologue de l'Institut des études politiques et sociales de Rio.
Peu importe qu'il s'avoue nul en économie, les marchés ont fini par choisir son camp. Ces derniers jours, la Bourse de Sao Paulo comme le réal ont repris des couleurs avec ses très bons sondages.
Haddad, lui, veut "rendre le peuple heureux à nouveau" comme sous les deux mandats de croissance de Lula (2003-2010), par des politiques sociales, la fin du gel des dépenses publiques et un contrôle des armes à feu.
"Voter par peur ou colère"
Paradoxalement, les deux candidats de tête font l'objet du plus fort rejet parmi les 147 millions d'électeurs brésiliens.
Bolsonaro s'est aliéné par ses insultes une majorité de Noirs, de femmes, d'homosexuels et de défenseurs des droits de l'Homme.
Haddad est le réceptacle de la haine farouche qu'inspire Lula à une bonne partie de la droite, du centre, des milieux d'affaires et des classes aisées.
Si le PT a gagné les quatre dernières présidentielles, son histoire avec le pays s'est très mal terminée avec la destitution fracassante en 2016 de Dilma Rousseff, qui a mis fin à 13 ans d'un règne pétiste jugé responsable des plaies actuelles du Brésil.
Entre l'extrême droite et la gauche, les électeurs plus mesurés vont s'exprimer "plus par peur ou par colère que par conviction", prévoit M. Monteiro, qui anticipe "un 2e tour encore plus radical, avec peut-être de la violence".
Le 1er tour devrait confirmer que la polarisation aura été fatale aux trois autres candidats de poids.
Ciro Gomes (PDT, centre gauche) espère toujours, malgré ses 11%, jouer le rôle d'outsider. Le candidat du PSDB Geraldo Alckmin (8%) aura incarné l'effondrement imprévu du centre. Quant à l'écologiste Marina Silva (Rede), qui avait réuni plus de 20 millions de voix aux deux dernières présidentielles, elle s'est écroulée à 4%.
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