"Il faut revenir à une agriculture paysanne, car la planète se meurt avec l'agriculture intensive", s'inquiète ainsi Christian Grisollet, membre d'une nouvelle association : "NDDL Poursuivre ensemble".
Huit mois se sont écoulés depuis l'abandon du projet d'aéroport, qui a mobilisé les zadistes pendant des années derrière le slogan : "contre l'aéroport et son monde".
"Le +pas d'aéroport+ était très important, mais le fait de défendre un autre monde est essentiel", souligne Nicole Chelli, venue sur la "zone à défendre" de nombreuses fois, et notamment lors des expulsions, émaillées de violents affrontements entre gendarmes mobiles et zadistes au printemps.
"Ils sont épatants ici", poursuit la sexagénaire, heureuse de découvrir que les zadistes mettent un point d'honneur à n'utiliser aucun produit polluant et à produire dans des quantités raisonnables.
"Tous les jeunes sont allés chercher du savoir chez les anciens", insiste-t-elle, la voix couverte par le son des marteaux qui érigent derrière elle une façade du "Hangar de l'Avenir".
Sur ce chantier, Douglas, un habitant de la ZAD spécialisé dans les constructions en bois, explique qu'il est important d'encourager la transmission des savoirs. "Ici, on n'envisage pas une agriculture déliée du reste", insiste-t-il.
C'est pourquoi des habitants ont présenté à la préfecture des projets agricoles liés à des projets de gestion de la forêt ou à des structures comme l'Ambazada, une ruine transformée en lieu de rencontres entre territoires en luttes.
Actuellement, 15 projets agricoles bénéficient d'une convention d'occupation précaire (COP) jusqu'à la fin 2018. Mais selon Camille, du "Bureau d'autodéfense administrative", leur pérennité est loin d'être assurée.
À ses yeux, définir qui exploitera les terres ne suffit pas. "On veut aussi que des préconisations soient faites" sur le type d'agriculture qui peut être pratiqué sur la zone afin que ne soit pas permis "l'arrachage de haies ou l'utilisation du glyphosate", poursuit-il.
Comité de pilotage mi-octobre
"D'un côté, on nous demande de construire des projets d'installation (agricole) dans les clous, mais de l'autre on ne nous donne pas la surface suffisante pour les développer", insiste le jeune homme installé ici depuis 2011 et prêt à défendre ses positions au prochain comité de pilotage en préfecture le 12 octobre.
Cette échéance a encouragé les zadistes à ouvrir leurs portes durant deux jours, pour présenter leurs projets. Peu avant que la foule ne se dirige vers deux fermes concernées, Cédric, qui fabrique du pain sur la ZAD, explique qu'on "veut montrer qu'on peut remobiliser même si le projet d'aéroport a été abandonné".
Cécile a, elle, participé à la culture des haricots durant l'été. À l'issue de la journée de battage, elle espère qu'une tonne sera récoltée. "Les gens viennent ici pour la première fois, et il voit qu'on fait du pain, de la bière, du maraîchage", s'enthousiasme Cédric, surpris d'avoir acquis autant de compétences sur place.
"Cela m'impressionnait de venir ici", concède pour sa part Clémentine, venue avec ses deux enfants et qui écoute d'une oreille attentive les discours qui s'enchaînent. "On va faire une autre forme d'agriculture, une agriculture où il n'y a pas de glyphosate, une agriculture qui ne soit pas intensive", clame une oratrice, sous les applaudissements.
Donner une nouvelle image à ce lieu est aussi la motivation de Françoise, qui a créé l'association "Les Sentiers de Camille", en 2017 avec des passionnés de randonnées. "La nature ici n'a pas bougé depuis 50 ans", s'émerveille-t-elle.
C'est pour préserver cet environnement qu'il faut "revenir à des choses à tailles humaines comme nos aïeux les ont connues", explique Christian Grisollet, concluant que "la légitimité sur les terres va à ceux qui les ont défendues".
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