A 75 ans, le dirigeant, qui lutte contre un cancer de l'estomac et se montre peu depuis sa maladie, est apparu en forme jeudi soir, en blazer foncé sur une chemise claire, devant 750 personnes réunies par un cercle d'affaires local.
Accueilli sous les applaudissements comme une vedette du show-biz, il a d'emblée eu droit à un ton bienveillant en s'installant dans un large fauteuil.
"Comment allez-vous Bernard?", interroge l'animatrice.
"On n'appelle pas ça une longue maladie pour rien", soupire-t-il, mais "l'énergie c'est la seule défense possible contre ces petites bêtes méchantes qui veulent mettre un terme à votre existence".
Sa santé, son arrivée en politique sous l'aile de François Mitterrand, son passage en prison dans les années 1990 ou ses premiers pas au cinéma et au théâtre: tous les sujets ou presque sont abordés pendant une heure et demie.
L'homme d'affaires a l'occasion de raconter 40 ans de vie publique mais aussi de dévoiler une part de son intimité.
Parler de son père, l'ouvrier communiste d'origine ariégeoise, "élevé à la dure, d'une pudeur démesurée", qui n'a su exprimer combien il adorait sa femme qu'à 90 ans, juste avant de mourir.
Ou de son épouse Dominique qui, dit-il, a menacé de le quitter s'il se relançait en politique à Marseille au moment de la reprise du journal La Provence en 2013.
C'est elle aussi qui, vingt ans plus tôt, au summum des déboires judiciaires, "a eu l'intelligence" de cacher l'arme avec laquelle il aurait pu se suicider.
"Sans (cela) je l'aurais fait", confie-t-il au détour d'un échange sur le suicide en 1993 de Pierre Bérégovoy, le chef de gouvernement dont il a été le ministre quelques années après son élection comme député.
"Quand vos gosses vont à l'école et que sur les kiosques il y a votre tête avec marqué +escroc+, (...) qu'un gamin se fait chahuter à longueur de journée (...) alors vous savez que votre disparition va les faire souffrir, mais ça sera plus court qu'une souffrance permanente", lance Bernard Tapie.
"On verra qui a volé qui"
Au rayon des affaires, l'interminable litige avec l'Etat français sur la revente d'Adidas, qui lui vaut d'être une nouvelle fois renvoyé devant un tribunal en France, est évacué rapidement.
"C'est en cours, l'affaire n'est pas jugée, (...) on verra à la sortie qui a volé qui", balaie-t-il.
Ce dossier a rebondi avec l'annulation en 2015 par la justice française de l'arbitrage en vertu duquel il s'était vu octroyer en 2008 environ 400 millions d'euros, en réparation du préjudice qu'il estimait avoir subi à la revente d'Adidas dans les années 1990.
En réaction, afin d'empêcher la saisie de ses biens par ses créanciers, il a placé plusieurs sociétés en procédure de sauvegarde en France. Certains de ses actifs ont aussi été transférés en Belgique, où des procédures judiciaires sont également en cours.
Mais il n'en est pas question jeudi soir.
Quand le micro est donné au public pour la dernière demi-heure, le football revient au coeur du débat.
Les Belges se souviennent que jamais un club français n'avait été champion d'Europe avant le sacre de l'Olympique de Marseille en 1993, sous la houlette de Tapie et du légendaire entraîneur belge Raymond Goethals.
"Bernard vous êtes un mec super et un grand monsieur, respect!", lui lance un fan de l'OM qui fait sourire tout l'auditoire.
Pour donner le change, Bernard Tapie livre une dernière anecdote sur le transfert raté de Diego Maradona de Naples à Marseille en 1989.
A l'époque, assure-t-il, des Napolitains qui "faisaient commerce de Maradona" étaient très hostiles au projet. "Il valait mieux que ça ne se fasse pas, pour lui d'abord".
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