Condamné à trois ans de prison ferme pour avoir fait perdre 4,9 milliards d'euros à son ancienne banque en 2008, l'ex-trader de 41 ans a fait savoir, par la voix de son avocat, qu'il était "déterminé à faire triompher le droit" et ne comptait pas en rester là.
Venus en rang serré, les avocats de la Société Générale savouraient leur victoire dans un recoin ombragé de la cour du Palais de justice de Paris. La commission d'instruction de la Cour de révision "a décidé qu'il n'y avait aucun élément nouveau et que la requête qui avait été déposée était irrecevable", a déclaré à la presse Me Jean Veil.
"Le bon droit a triomphé", s'est-il félicité, avant d'ajouter avec ironie: "Il y a la possibilité comme dans l'affaire Seznec, de recommencer dans 20 ans. Quand nous serons à la retraite, nos descendants ou nos jeunes associés pourront reprendre ce très intéressant dossier". Neuf demandes de révision ont été déposées en vain pour Guillaume Seznec, condamné pour meurtre en 1924.
La Cour de révision est seule habilitée à décider de l'éventuelle organisation d'un nouveau procès, un événement qui reste exceptionnel en France où seuls onze condamnés ont bénéficié d'une révision de leur procès et d'une réhabilitation au cours des cinquante dernières années.
Mais le camp Kerviel ne s'avoue pas battu. "Ce n'est certainement pas la fin de l'affaire dite +Kerviel+", a déclaré son avocat Julien Dami le Coz, sans toutefois dire ce qu'il comptait faire à présent.
"Partiellement responsable" -
Jérôme Kerviel a été condamné en 2010 à cinq ans de prison, dont deux avec sursis, pour abus de confiance, faux et usage de faux ainsi que pour manipulations informatiques, pour avoir fait perdre 4,9 milliards d'euros à la Société générale plus de deux ans auparavant.
Un jugement confirmé en appel en 2012 et maintenu en 2014 dans ses dispositions pénales par la Cour de cassation - laquelle avait toutefois cassé les dispositions civiles. La condamnation pénale de Jérôme Kerviel est donc aujourd'hui définitive.
En 2016, la commission s'était déjà penchée sur cette affaire et avait remis à plus tard sa décision, faisant valoir que plusieurs procédures étaient encore en cours.
Depuis, les juges d'instruction ont rendu à deux reprises un non-lieu dans des volets où la probité de la Société Générale était mise en cause, notamment pour "subornation de témoin", "escroquerie au jugement" et "faux et usage de faux".
Toute la question était de savoir si la Société générale savait ce que faisait son trader ou si elle a, comme elle le dit, été totalement trompée.
A l'appui de sa demande déposée le 15 mai 2015, Jérôme Kerviel, qui accuse son ancien employeur d'avoir non seulement eu connaissance de ses agissements litigieux mais d'avoir ensuite manipulé l'enquête, met notamment en avant le témoignage de l'ex-enquêtrice de la brigade financière Nathalie Le Roy - qui a affirmé avoir été "instrumentalisée" par la banque alors qu'elle travaillait sur ce dossier.
Nathalie Le Roy avait enregistré à son insu une ex-membre de la section financière du parquet de Paris chargée du dossier, Chantal de Leiris, qui avait porté plainte, entraînant l'ouverture d'une nouvelle enquête.
Des éléments déjà connus selon la commission d'instruction, qui déclare la requête "irrecevable sans qu'il y ait lieu de procéder aux investigations complémentaires sollicitées".
A la suite de la décision de la Cour de cassation de 2014, l'ancien trader avait obtenu un nouveau procès au civil: il a été déclaré en septembre 2016 "partiellement responsable" du préjudice subi par la Société Générale et condamné à lui verser un million d'euros. Une demi-victoire pour celui qui devait initialement débourser 4,9 milliards d'euros.
La banque, elle, se voit désormais réclamer par le fisc le remboursement du crédit d'impôt de 2,2 milliards d'euros dont elle a bénéficié juste après la fraude, puisque la faute n'est plus totalement imputée à Jérôme Kerviel.
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