"J'ai décidé de donner le feu vert à la réintroduction de deux ourses femelles dans les Pyrénées-Atlantiques", a déclaré le ministre devant la presse à l'issue d'une réunion, chahutée, en préfecture avec une soixantaine d'élus et acteurs locaux.
"Cela sera fait dans la période prévue pour cela, d'ici au début du mois d'octobre (…) avec la Slovénie, notre partenaire", a poursuivi le ministre qui a "décidé de l'annoncer ici, dans les Pyrénées-Atlantiques. J'aurais pu me contenter de signer un arrêté dans mon bureau".
"Beaucoup d'élus sont hostiles", a-t-il rappelé, "à un moment donné, il faut décider, c'est ce que j'ai fait. Je ne me dérobe pas, je viens les entendre en face et je continuerai cette journée dans le Béarn".
Le ministre devait en effet visiter dans l'après-midi une estive, ce pâturage de montagne d'été pour les troupeaux, au dessus d'Etsaut. "Je vais aller rencontrer des bergers malgré les pressions exprimées ou les refus de tout contact", a-t-il dit, "je crois au dialogue. Si on attend, on ne décide jamais rien. J'ai voulu qu'il y ait ce temps d'échange", a ajouté M. de Rugy en estimant qu'il fallait "sortir de l'enlisement. C'est ma ligne de conduite."
Le successeur de Nicolas Hulot avait annoncé en fin de matinée sa décision à une soixantaine d'élus dont une large partie, en apprenant la nouvelle, a claqué la porte de la réunion.
"A quoi bon discuter puisque la décision est déjà prise. Nous sommes sortis", a lancé Etienne Serna, maire d'Aramits (Pyrénées-Atlantiques) et porte-parole d'un collectif de maires locaux anti-ours.
"On les enlèvera"
Au même moment à 40 km, dans le village d'Asasp-Arros, porte d'entrée de la vallée d'Aspe, quelque 200 éleveurs et bergers -- qui avaient refusé d'aller rencontrer le ministre -- se sont rassemblés pendant deux heures, pour redire qu'ils refuseraient "par tous les moyens" la réintroduction des ours.
"On veut protéger nos troupeaux, donc c'est ce qu'on fera", a lancé à une assistance chauffée à blanc, Olivier Maurin, éleveur président de l'Association pour le développement durable de l'identité des Pyrénées (ADDIP).
"On ne veut pas de prédateurs, et on les enlèvera", a-t-il ajouté en estimant qu'"on nous passe par-dessus, on nous écrase. On se fout de l'avis des maires, des élus, des éleveurs, des gens qui vivent sur le territoire", a-t-il pointé.
Au bout d'un long bâton de berger, des manifestants avaient pendu un gros ours en peluche, avec la mention "Wanted, mort ou édenté". Sur une table, en évidence, trônaient quatre fusils, malgré les barrages de gendarmes, qui fouillaient les véhicules sur les accès routiers au village.
Ce projet de réintroduction de deux ourses -- il ne reste plus que deux mâles dans le secteur - s'inscrit dans le cadre d'un "plan ours" publié en mai, avait été lancé par Nicolas Hulot.
Nombre d'acteurs locaux espéraient que le nouveau ministre y renonce, notamment des bergers qui craignent pour leurs troupeaux, tout en mettant souvent l'accent sur les attaques de loups.
Plusieurs ONG ont en revanche salué cette décision comme le WWF (Fonds mondial pour la nature) qui y voit "un signal fort de la volonté du gouvernement d'enrayer la disparition du vivant sur le territoire français".
Cette réintroduction devra être faite "en accompagnant les éleveurs" et "des pratiques de gardiennage avec des chiens de protection", a indiqué Jean-David Abel de la FNE (France Nature Environnement) à l'AFP, rappelant que l'ours "est d'abord omnivore".
"Contente" de la décision, Sabine Matraire, de l'association Ferus, a affirmé que l'ours serait responsable de la perte d'environ 200 brebis par an dans le massif pyrénéen, sur une population totale de 600.000 brebis et alors que les pertes annuelles moyennes, toutes causes confondues, sont de l'ordre de 10 à 15% en estive en absence d'un berger.
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