Le juge Claudio Bonadio, en charge du vaste scandale, la soupçonne d'avoir été la responsable avec son mari Nestor Kirchner, président de 2003 à 2007, d'un système de corruption dans lequel des chefs d'entreprises versaient des pots-de-vin à des fonctionnaires en échange de marchés publics.
Le placement en détention de l'ancienne présidente, protégée par son immunité parlementaire en tant que sénatrice, est toutefois improbable.
L'annonce de son inculpation comme "cheffe d'une association illicite" intervient la veille d'une troisième convocation de Mme Kirchner devant le juge Bonadio.
Le scandale des "Cahiers de la corruption" a éclaté le 1er août à la suite de la publication du contenu de cahiers dans lesquels le chauffeur du vice-ministre de la Planification, Roberto Baratta, notait minutieusement les lieux et dates des remises de sacs d'argent à des membres de l'administration Kirchner, par des chefs d'entreprises de travaux publics.
"Pressions"
Le procureur Carlos Stornelli estime qu'au moins 160 millions de dollars de dessous-de-table ont été versés à des fonctionnaires kirchnéristes entre 2005 et 2015.
Des dizaines de fonctionnaires et de chefs d'entreprise sont impliqués dans cette vaste affaire.
Selon l'acte d'accusation du juge Bonadio, diffusé lundi, "de 2003 à 2015, une collusion entre fonctionnaires et chefs d'entreprises a fait fonctionner un système de distribution de pots-de-vin à des fonctionnaires", dans lequel les chefs d'entreprises "prétendent avoir cédé aux pressions officielles".
"Pour gagner un marché public, une entreprise ou un groupement d'entreprises devaient remettre (une somme d'argent liquide correspondant à) un pourcentage du montant total payé par l'Etat aux fonctionnaires désignés par Nestor Kirchner et Cristina Kirchner", écrit le magistrat, que Mme Kirchner a tenté en vain de récuser.
Lors des deux premières comparutions de Mme Kirchner devant le juge, celle-ci a refusé de répondre à ses questions, remettant à la place une déclaration écrite, comme la loi l'y autorise.
"Je nie catégoriquement avoir fait partie d'une association illicite ou avoir commis un délit. L'enquête est délibérément dirigée contre moi, il n'y a pas la moindre preuve qui accrédite les délits qu'on m'attribue de manière calomnieuse", a déclaré le 3 septembre l'ex-présidente, aujourd'hui âgée de 65 ans.
Ministres en prison
Cristina Kirchner a déjà été inculpée dans quatre autres affaires, dont certaines pour corruption. Elle doit être jugée prochainement pour trois d'entre elles.
L'immunité parlementaire assure la liberté à l'ancienne présidente, mais ne l'empêche pas d'être jugée, voire condamnée.
Une levée de l'immunité de Mme Kirchner n'est pas d'actualité, a répété lundi Miguel Angel Pichetto, chef du groupe péroniste Argentiune Federal, le plus représenté au Sénat, rappelant que la levée de l'immunité n'intervenait "qu'en cas de condamnation, pas en cas de prison préventive".
L'ex-président Carlos Menem (1989-1999), 88 ans, continue cependant de siéger au Sénat où il a été réélu en 2017 malgré une condamnation à 7 ans de prison pour contrebande d'armes vers l'Equateur et la Croatie.
Le juge Bonadio a déjà expédié en prison une dizaine de fonctionnaires du ministère de la Planification, qui était le centre névralgique de la corruption liée aux travaux publics. Parmi eux, le vice-ministre Roberto Baratta, dont le chauffeur Oscar Centeno a révélé les remises de sacs d'argent dans un cahier.
M. Bonadio n'a pas eu besoin de signer un mandat d'arrêt contre le ministre de la Planification Julio De Vido, ni contre le vice-ministre Julio Lopez : tous deux se trouvaient déjà en prison dans le cadre d'autres affaires.
L'arrestation de Julio Lopez, en juin 2016, avait été rocambolesque. Il avait été pris en flagrance alors qu'il tentait de dissimuler 9 millions de dollars en liquide dans un couvent près de Buenos Aires.
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