Figure populaire et controversée de l'islam francophone, Tariq Ramadan est mis en examen depuis le 2 février, accusé d'avoir violé Henda Ayari, sa première accusatrice, et une deuxième femme, surnommée "Christelle".
Le théologien suisse de 56 ans, atteint d'une sclérose en plaques dont le traitement a été jugé administrable en prison, est détenu à l'hôpital pénitentiaire de Fresnes, au sud de Paris, au grand dam de ses soutiens.
Sa confrontation avec "Christelle" était prévue le 18 juillet dans le bureau des juges, mais avait dû être reportée en raison de l'état de santé de la plaignante. Ce qu'a confirmé une expertise médicale, réclamée par la défense.
"L'enjeu est moindre que lors de la première confrontation en garde à vue (le 1er février, NDLR) où Tariq Ramadan était à l'aveugle sur le dossier et ne pouvait ajuster sa défense à la réalité des pièces", a déclaré à l'AFP l'avocat de la plaignante, Me Eric Morain.
"Ma cliente reste déterminée, d'autant plus après avoir été salie et accusée à tort d'avoir repoussé de manière infondée la confrontation de juillet", a-t-il ajouté.
En garde à vue, le théologien avait seulement admis un "jeu de séduction" dans les correspondances avec cette admiratrice. Il avait déclaré l'avoir vue 20-30 minutes dans le hall de l'hôtel le 10 octobre 2009, alors qu'elle affirme y avoir été violée la veille avec une rare violence puis abandonnée, en état de choc, dans la chambre de M. Ramadan.
La défense assure aussi, photos et témoignages - contestés - à l'appui, que "Christelle" était présente à la conférence que le prédicateur avait donné le soir même des faits dénoncés.
"Rapports de domination"
Lors de cette première confrontation, "Christelle" avait décrit aux enquêteurs la cicatrice que Tariq Ramadan porte à l'aine. Pour la défense, cet élément, qui avait pesé dans la décision d'incarcération, a pu être obtenu par une éventuelle "collusion" des plaignantes avec des adversaires, notamment la polémiste Caroline Fourest, et d'anciennes maîtresses de l'intellectuel.
Tariq Ramadan, qui clame son innocence, a reconnu pour la première fois en juin plusieurs relations extraconjugales "consenties" et des "rapports fougueux, de domination", notamment avec une troisième plaignante apparue en mars. Elle dénonce neuf viols en France, à Londres et à Bruxelles, de 2013 à 2014.
Le théologien n'a pas encore été interrogé ni mis en examen dans ce volet, dans lequel il est placé sous le statut de témoin assisté.
Son avocat, Me Emmanuel Marsigny, a par ailleurs déposé fin juillet une requête en nullité contre les témoignages de deux anciennes maîtresses recueillis sous X lors de l'enquête préliminaire avec l'assistance de l'avocat de "Christelle".
Le 19 juillet, Tariq Ramadan a pu être confronté pour la première fois à Henda Ayari, dont la plainte, déposée à l'automne dans le sillage du mouvement #MeToo, avait lancé l'affaire.
Mais les déclarations de cette ancienne salafiste, devenue militante laïque, a été affaiblie par ses revirements sur la date et le lieu des faits qu'elle dénonce.
Le lendemain, la défense de Tariq Ramadan, qui réclamait l'annulation des mises en examen en pointant les "contradictions" des plaignantes, s'est vu refuser cette demande, jugée "prématurée" par les magistrats.
Le théologien avait aussi déposé dans la foulée une deuxième demande de mise en liberté sous contrôle judiciaire, avec remise de son passeport suisse et d'une caution de 300.000 euros, elle aussi rejetée début août.
Les magistrats ont invoqué principalement le "risque de pression" sur les plaignantes et le report de la confrontation avec "Christelle", selon leur décision dont a eu connaissance l'AFP. La défense de M. Ramadan entend déposer dès mardi, après la confrontation, une troisième demande de mise en liberté.
En Suisse, une quatrième femme a porté plainte à Genève, où une instruction a été ouverte, selon un porte-parole du ministère public cité dans la presse.
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