Cette semaine à Florianopolis, paradis des surfeurs au sud du Brésil, se tenait la réunion bisannuelle du seul organe de gestion des grands cétacés. Elle s'annonçait tendue et elle a tenu ses promesses, au rythme des clashes entre pays pro et anti-chasse.
La session s'est achevée vendredi par le rejet du texte phare porté par le Japon, intitulé "le chemin à suivre".
Il visait à mettre en place une double voie au sein de la CBI, instance de 89 pays membres, afin de faire co-exister la préservation et la chasse commerciale des baleines. Cette dernière aurait été gérée par un "comité de la chasse à la baleine durable".
La proposition aurait aussi mis fin au moratoire sur cette activité mis en place en 1986.
Mais les pays défenseurs des baleines, conduits par l'Australie, l'Union européenne et les Etats-Unis, ont torpillé le texte nippon, par 41 voix contre 27.
Les îles du Pacifique et des Caraïbes, le Nicaragua et plusieurs pays du continent africain, dont le Maroc, le Kenya et la Tanzanie, ont suivi le Japon, tout comme le Laos et le Cambodge. La Corée du Sud s'est abstenue.
"Notre préoccupation est de ne pas trop diviser la Commission, c'est pour cela que nous nous sommes abstenus", a expliqué le représentant russe, qui comme nombre de pays autorise la chasse aux cétacés pour les autochtones.
- Dernière apparition japonaise? -
Six des 89 pays membres n'ont pas envoyé de délégation et sept autres nations, africaines pour la plupart, qui n'ont pas payé leur cotisation, n'étaient pas autorisées à prendre part aux votes.
Le vice-ministre japonais de la Pêche Masaaki Taniai a vivement regretté le résultat du vote et a menacé de quitter la CBI.
La consommation de baleine a une longue histoire dans l'archipel nippon, pays de pêcheurs où le cétacé a été chassé pendant des siècles. L'industrie baleinière a connu son essor après la Seconde guerre mondiale, pour apporter des protéines animales aux habitants du pays, mais ces dernières années la consommation de chair de baleine a considérablement diminué.
De son côté, Tokyo estime que la population de baleines est assez importante pour supporter une reprise de la chasse commerciale.
"Si les preuves scientifiques et la diversité ne sont pas respectées, si la chasse à la baleine commerciale est totalement niée... Le Japon va devoir réévaluer sa position en tant que membre de la CBI", a-t-il déclaré.
Selon lui, le résultat du vote "peut être vu comme une négation de la possibilité pour des gouvernements avec des points de vue différents de coexister dans le respect et la compréhension mutuels au sein de la CBI".
Le président sortant de cet organisme, le Japonais Joji Morishita, dont le mandat s'est achevé vendredi à l'issue de la réunion, a refusé de dire s'il s'agissait de la dernière apparition de son pays.
- "Une autre organisation" -
Quelques minutes après la fin de la session, s'exprimant à nouveau au nom de son pays, il a déclaré à l'AFP que les différends avec les nations anti-chasse étaient désormais "très clairs" et que le Japon allait s'organiser pour les "prochaines étapes", sans plus de précision.
Selon M. Morishita, une décision devra être prise à l'avenir pour savoir si la chasse à la baleine est gérée "par une autre organisation ou par plusieurs autres organisations".
En réponse, le représentant australien Nick Gales, qui a appelé Tokyo à rester au sein de la CBI, a rejeté "le discours (tenu par le Japon) qui souligne l'intolérance et les dysfonctionnements" de cet organisme.
Le camouflet est d'autant plus rude pour le Japon qu'un texte pro-cétacés a lui été adopté au Brésil. La "déclaration de Florianopolis", non-contraignante, stipule que la chasse à la baleine est une activité qui ne se justifie plus économiquement.
En revanche, les pays chasseurs ont réussi à bloquer la création d'un sanctuaire dans l'Atlantique sud pour ces cétacés menacés d'extinction.
Glenn Inwood, de Opes Oceani, une entreprise qui analyse l'usage des ressources des océans, juge que cela n'a plus grand intérêt pour le Japon de rester au sein de la CBI, tant d'un point de vue économique que politique.
"Nous avons appris depuis la décision américaine sur les accords de Paris que les pays sont prêts à réexaminer leur soutien aux accords internationaux qui ne sont pas en harmonie avec leurs intérêts", souligne-t-il
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