Après deux années fastes, la récolte est maigre, de quoi rééquilibrer un marché en crise, confronté à la baisse de la demande et à la concurrence féroce du Chili.
Sous un grand hangar, les prunes d'Ente défilent sur un tapis roulant pour être nettoyées. Triées à la main, elles finissent bien alignées sur des claies, grands cadres en bois avec un grillage en inox, avant leur séchage dans de longs fours.
"Une fois la récolte terminée, on trie les prunes séchées pour voir les gros défauts", explique Dominique Botteon, agriculteur à Lévignac-de-Guyenne.
Dans le Lot-et-Garonne et les cinq départements limitrophes, qui représentent 98% de la superficie nationale, la récolte devrait être divisée de moitié en raison des aléas climatiques: 25.000 tonnes attendues contre 53.000 t l'an dernier.
"Cette faible récolte va permettre de faire baisser les stocks des deux dernières années et de conserver les marchés", se réjouit M. Botteon, également président du Bureau interprofessionnel du pruneau (Bip).
Pour le transformateur Emeric Cadalen, "la crise est là". "Elle date d'il y a deux ans avec la surproduction et le maintien d'un prix assez fort car on manquait de stock et on a acheté une récolte plus importante que nos circuits pouvaient écouler", explique-t-il.
Sa société, Fruit Gourmet à Allemans-du-Dropt, transforme 550 tonnes de pruneaux par an mais il lui reste 200 tonnes à écouler de la récolte précédente.
Une bonne odeur de pruneau se dégage dans l'entreprise: ce sont les fruits secs qui sont réhydratés car "les clients les aiment moelleux".
"Proche du pain complet"
Les pruneaux sont ensuite conditionnés et expédiés principalement en France. Quelque 30% de la production française part à l'export avec l'Espagne, la Belgique et l'Italie en tête et pour les pays hors Union européenne, l'Algérie. Aujourd'hui, de plus en plus de Chinois en sont aussi friands. Mais en Allemagne et Scandinavie, le pruneau d'Agen a perdu des marchés.
La cause? Le prix avec un euro d'écart par kilo comparé aux Chiliens, premier producteur mondial (100.000 tonnes contre 10.000 t il y a 20 ans), suivis par les Californiens (80.000 t) et loin derrière les Français: 40.000 t pour des ventes annuelles de 174 millions d'euros.
Le pruneau est aussi victime de la mode des fruits secs exotiques comme les baies de goji, alors que la fillière peine à communiquer pour faire connaître ce fruit technique, produit et transformé en 11 étapes localement.
Véritable or noir du Lot-et-Garonne, le pruneau d'Agen entend faire valoir ses atouts auprès des consommateurs en vantant son calibre plus gros, une traçabilité grâce à son Indication géographique protégée (IGP) et surtout sa qualité avec un goût plus prononcé.
La filière veut regagner les marchés en étant davantage compétitif et qualitatif. Des projets sont à l'étude pour moderniser le matériel avec par exemple une réduction possible de 40% des coûts de séchage, et l'utilisation d'engrais et pesticides tend vers la baisse à tel point que le pruneau bio a la cote.
Avec 10% des surfaces et 8% de la production, la demande est plus forte que l'offre en agriculture biologique. "Il manquait 800 tonnes lors de la dernière campagne", estime Salim Rashidi, directeur du Bureau interprofessionnel du pruneau (Bip), qui souhaiterait mettre en avant ses qualités nutritives.
Au-delà de ses propriétés laxatives bien connues, le pruneau est intéressant, surtout pour les sportifs. "C'est un fruit relativement équilibré. Outre son apport en glucides, il apporte beaucoup de fibres et de sorbitol, ce qui fait que malgré cette richesse en sucre, son index glycérique est relativement bas, proche du pain complet", souligne ce représentant de la filière.
Ce super fruit pourrait aussi lutter contre l'ostéoporose. Reste à confirmer les bons résultats obtenus sur les animaux lors de l'essai clinique en cours aux Etats-Unis.
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