Symboliquement, le président a choisi de s'exprimer à 10H00 au musée de l'Homme, un vaste bâtiment consacré à "l'évolution des sociétés", à Paris. Lundi, il a passé cinq heures dans un centre d'ATD Quart Monde pour rencontrer des personnes touchées par la grande pauvreté.
En le présentant lui-même, Emmanuel Macron veut démontrer l'importance qu'il accorde à ce plan, cinq jours avant la présentation de celui sur la réorganisation du système de santé.
Il compte sur ces deux rendez-vous pour reprendre la main après une rentrée agitée, en mettant en scène un virage social dans son quinquennat.
Les mesures de lutte contre la pauvreté étaient attendues en juillet mais le chef de l'Etat avait décidé au dernier moment de les reporter, provoquant la déception des acteurs du secteur, d'autant que ce délai avait semblé lié au Mondial de football.
Ces derniers s'alarment de "l'urgence" de la situation dans un pays où trois millions d'enfants - un sur cinq - vivent sous le seuil de pauvreté.
Au total, la proportion de la population vivant sous ce seuil (1.026 euros par mois) était de 14% en 2016, soit environ neuf millions de personnes, selon l'Insee. Parmi elles, près de 5 millions ont moins de 855 euros mensuels pour vivre.
"Depuis 2008, on constate une reprise lente de la pauvreté, mais aussi un problème d'irréversibilité. C'est-à-dire qu'il n'y a pas plus de pauvres mais qu'on a du mal à en sortir", explique à l'AFP Jérôme Vignon, président de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale (Onpes).
Pour Emmanuel Macron, "se sont installées en France des inégalités de destin. Selon l'endroit où vous êtes né, la famille dans laquelle vous avez grandi, l'école que vous avez fréquentée, votre sort est le plus souvent scellé". "Le cœur même d'une politique sociale n'est pas d'aider les gens à vivre mieux la condition dans laquelle ils sont nés et destinés à rester mais d'en sortir", avait-il ajouté devant le Congrès.
Précarité
De ce fait, la "stratégie" dévoilée jeudi sera tournée vers la prévention de la pauvreté dès le plus jeune âge et l'accompagnement vers l'emploi, selon l'exécutif.
"Il y aura de la dépense pour accompagner mieux les personnes vers leur émancipation", a promis la ministre des Solidarités Agnès Buzyn, évoquant "une stratégie ambitieuse" qui cherche à résoudre les "obstacles qui maintiennent les personnes dans la précarité" comme la santé, le logement, le transport, ou l'accès à la garde d'enfant.
Le président pourrait faire des annonces importantes sur les minima sociaux, s'inspirant de deux rapports parlementaires remis la semaine passée au Premier ministre. Ils prônent l'homogénéisation de leur calcul pour mieux prendre en compte les revenus réels des allocataires, avant une éventuelle fusion de prestations, et l'automatisation du RSA pour laisser plus de place à l'accompagnement des bénéficiaires.
L'exécutif se démarque ainsi de la politique du quinquennat de François Hollande, caractérisée par une revalorisation du RSA et la création de la Garantie jeunes pour les 16-25 ans.
Dans une vidéo abondamment commentée, Emmanuel Macron s'était emporté mi-juin contre le "pognon de dingue" que coûtent les aides sociales sans sortir leurs bénéficiaires de la pauvreté. Cette petite phrase avait indigné la gauche et beaucoup inquiété les associations de défense des plus démunis.
En matière de prévention, devraient être annoncés jeudi une aide à l'instauration de petits-déjeuners dans les écoles prioritaires, un bonus financier pour les crèches accueillant des enfants défavorisés ou la formation obligatoire jusqu'à 18 ans.
L'extension de la CMU (couverture maladie universelle) à plusieurs millions de Français pour qu'ils bénéficient d'une complémentaire santé et des mesures pour éviter de laisser tomber à 18 ans les jeunes de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) devraient en outre être évoquées.
"Ce qu'on veut entendre, c'est qu'il faut éradiquer la pauvreté. Et plus que des paroles, c'est des moyens à la hauteur de cet enjeu qu'on attend", a prévenu Claire Hédon, présidente d'ATD Quart monde.
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