Rendu public en plein débat sur l'organisation de l'islam en France, le rapport de ce groupe de réflexion libéral veut réformer la deuxième religion de France et s'alarme particulièrement de la prolifération des thèses islamistes sur internet.
Intitulé "la fabrique de l'islamisme", ce document énumère les "usines de production de l'islamisme" (Frères musulmans en Egypte, wahhabisme en Arabie Saoudite, "turco-islamisme en Turquie"...) et souligne "l'incroyable" influence des réseaux sociaux dans son expansion, assurant que derrière Barack Obama ou Donald Trump, six des dix plus grands "influenceurs mondiaux" sont saoudiens.
En France, l'auteur du rapport, Hakim El Karoui, dit constater une "progression de l'idéologie islamiste" même si "les islamistes (...) sont largement minoritaires".
Les salafistes - branche rigoriste de l'islam - "gagnent du terrain à l'intérieur de la communauté", surtout chez "les jeunes", selon lui. "Il y a à peu près 800.000 à un million de personnes qui suivent un discours religieux (...) produit par les salafistes", a-t-il affirmé sur Europe 1, disant s'appuyer sur une étude d'un institut de sondage.
Selon lui, la France doit "se doter de moyens et de réseaux importants pour diffuser [un] contre-discours" aux thèses salafistes.
Cet ancien conseiller de Jean-Pierre Raffarin à Matignon constate aussi que le "halal" imprègne de plus en plus "la façon de vivre ensemble", avec le développement de sites communautaires, d'hébergement ou de covoiturage "halal".
Un rapport qui "enfonce des portes ouvertes"
Ce rapport est publié alors que sont organisées jusque mi-septembre des "assises territoriales de l'islam de France" dans chaque département, sous l'égide des préfets, pour faire émerger auprès du président Emmanuel Macron des propositions sur l'organisation de l'islam de France et ses six millions de fidèles. Grands thèmes abordés : représentation institutionnelle, financement des mosquées et formation des imams et aumôniers.
Dans ce cadre, M. El Karoui présente à nouveau sa proposition de "création d'une institution chargée d'organiser et de financer le culte musulman" : l'Association musulmane pour l'islam de France (Amif).
Objectif : "Créer une organisation neutre, indépendante des pays d'origine, indépendante de ceux qui tiennent aujourd'hui les mosquées, pour prélever une toute petite somme d'argent sur chaque acte de consommation et réinvestir cette somme d'argent dans le travail théologique", souligne-t-il.
Cette structure pourrait notamment gérer une "taxe halal", idée maintes fois évoquée depuis les années 90. Il ne s'agirait pas d'un impôt prélevé par l'Etat, mais d'un prélèvement géré par l'association et s'inspirerait de la "taxe de cacherout" de la communauté juive, gérée par les rabbinats et qui permet de certifier les produits "casher".
"C'est la montagne qui a accouché d'une souris", a estimé auprès de l'AFP Abdallah Zekri, délégué général du Conseil français pour le culte musulman (CFCM), instance élue considérée comme représentative par les pouvoirs publics mais critiquée pour son manque d'efficacité. "Il n'y a aucune proposition nouvelle", a-t-il dit.
Il a rappelé que les grandes fédérations de mosquées, dont celles animant le CFCM, avaient annoncé en juillet un projet d'Association pour le financement et le soutien du culte musulman (AFSCM). Celle-ci va mettre en place une structure "chargée de collecter une contribution volontaire sur le halal, le pèlerinage, la zakat (aumône légale) et les dons des fidèles", selon le CFCM.
"C'est aux musulmans de s'occuper de leur religion, ce n'est pas à l'Etat de l'organiser", a par ailleurs estimé M. Zekri.
L'ancien président du CFCM Anouar Kbibech a pour sa part dit sur BFMTV "ne pas constater du tout cette montée si inquiétante" de l'islamisme décrite dans le rapport.
Dans un communiqué, Gérard Collomb, ministre de l'Intérieur, a pris note de "propositions très intéressantes (...) qui appellent à un rassemblement et une mobilisation des musulmans républicains en France".
Autre proposition du rapport : "relancer l'apprentissage de la langue arabe" à l'école. Il faut lui "donner du prestige", a répondu le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer.
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