"Il y a une chose qui caractérise la France, le peuple français, c'est son goût de l'intelligence, de l'ironie, de l'humour sur soi-même, et sans doute de la complexité", a affirmé le chef de l'Etat dans un sourire, au détour d'une conférence de presse à Helsinki.
"La polémique hors contexte en 140 signes (...) je peux vous dire que ce n'est pas l'esprit français (...) il vaut mieux que ce que certains en font", a insisté le président à Helsinki.
Mercredi à Copenhague, le président avait dit son admiration pour le modèle danois de "flexisécurité", et jugé que les différences culturelles ne permettaient pas de le répliquer à l'identique en France : "Ce qui est possible est lié à une culture, un peuple marqué par son histoire. Ce peuple luthérien, qui a vécu les transformations de ces dernières années, n'est pas exactement le Gaulois réfractaire au changement !"
Dans l'opposition, plusieurs ont vu dans cette saillie un écho de sa phrase de l'été 2017 sur les Français qui "détestent les réformes".
"Il avait qualifié les Français de fainéants, et maintenant devant la reine du Danemark il nous caricature en Gaulois réfractaires", a grondé Laurent Wauquiez, président des Républicains.
"Il peut parfaitement dire les qualités du peuple danois sans afficher une forme de condescendance vis-à-vis des Français", a pointé l'eurodéputé EELV Yannick Jadot.
"Si on ne peut plus manier l'ironie et la plaisanterie (...), on va tous faire de la langue de bois en chêne massif", avait rétorqué le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, avant la mise au point présidentielle.
Pendant que d'aucuns critiquaient une éventuelle faute de goût, d'autres ont soupçonné de la malice. Ainsi l'eurodéputé RN (ex-FN) Nicolas Bay a-t-il vu dans les propos présidentiels "une petite opération de diversion pour faire oublier ses difficultés de politique intérieure, la démission de Nicolas Hulot, l'affaire Benalla (...), les choix budgétaires."
"Le fond de sa pensée"
"Plutôt qu'une volonté de diversion, je suis convaincu qu'il traduit ici le fond de sa pensée", estime pour l'AFP Mathieu Chaigne, de l'institut BVA.
"Il s'adresse à des expatriés qui sont en capacité de comparer les diversités culturelles. Il plaît à son auditoire et perd de vue l'effet que ça peut avoir" avec "une France qu'il est en train de perdre, qui voit tout changement comme une menace, qui se sent comme une citadelle assiégée", poursuit le co-fondateur du site Délits d'opinion.
"Ce n'est pas du mépris que de dire les choses, et la vérité", a voulu assumer jeudi le chef de l'Etat : "Nous ne sommes pas un pays dont la culture est le consensus, les ajustements pas à pas". Un pays, pourtant, qui "dans les moments graves de l'Histoire, sait se transformer en profondeur".
Hasard du calendrier ou pas, les propos d'Emmanuel Macron interviennent alors que son Premier ministre Edouard Philippe reçoit à Matignon les représentants syndicaux pour parler assurance chômage et santé au travail.
"Nous sommes en 2018 après Jésus-Christ, toute la Gaule a été envahie par les Jupitériens. Toute? Non", a ironisé le secrétaire général FO Pascal Pavageau, surfant sur la référence aux aventures d'Astérix pour défendre les "irréductibles Gaulois attachés au modèle social".
"Je ne pense même pas pour le coup qu'il (Emmanuel Macron) ait raison sur le fond", a estimé le président de l'Assemblée François de Rugy. "Le peuple français est un peuple sage", "souvent un peu pessimiste", mais "lorsqu'on fait de la pédagogie et puis qu'on regarde les résultats (...) les gens n'ont pas envie de revenir en arrière", a-t-il assuré.
"Il promeut un modèle de société de +risk-takers+ (preneurs de risques, ndlr), qui se heurte à un système français qui cherche avant tout de la protection", analyse Mathieu Chaigne, "la vraie scission potentielle entre Macron et une partie de la France, elle est là".
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