"Je dis aux Vénézuéliens (...) qui souhaitent échapper à l'esclavage économique: arrêtez de laver les toilettes à l'étranger et rentrez vivre dans votre patrie!", a lancé mardi soir Nicolas Maduro, alors qu'il signait des accords pétroliers, lors d'un événement retransmis à la radio et à la télévision.
Fuyant la pauvreté, l'hyperinflation, la faillite des services publics et les pénuries dans leur pays, des centaines de milliers de Vénézuéliens émigrent dans les pays voisins comme le Brésil, la Colombie, l'Equateur, le Pérou et le Chili, mettant cette région, qui n'était pas préparée à un tel afflux, sous pression.
Selon les Nations unies, sur les 2,3 millions de Vénézuéliens vivant à l'étranger pour une population totale de 30,6 millions de personnes, plus de 1,6 million sont partis depuis 2015. Quelque 90% d'entre eux se sont réfugiés dans les pays de la région.
Le gouvernement socialiste assure que cet exode massif est dû à une "campagne de la droite" et que les migrants reviendront, puisqu'un plan de mesures économiques, entré en vigueur la semaine passé, sortira le pays de la débâcle.
"Racisme et mépris"
Il en veut pour preuve la centaine de Vénézuéliens rentrés lundi du Pérou par un avion affrété par le gouvernement. Attirés par le "chant des sirènes", ils y ont rencontré "le racisme, le mépris, la persécution économique et l'esclavagisme", selon Nicolas Maduro.
Mais dans les rue du Venezuela, les mesures censées redresser le pays inquiètent plus qu'elles ne rassurent.
"C'est un désastre, il n'y pas d'aliments de base. Les mesures, ce n'est que de la poudre aux yeux, elles vont renforcer les pénuries et le chômage", déclare à l'AFP Marielsi Ochoa, médecin de 34 ans, au milieu des présentoirs vides d'un supermarché
Hors du Venezuela, les signes de tension se multiplient face à l'ampleur de cette crise.
"Je décrète l'envoi des forces armées pour garantir la loi et l'ordre dans l'Etat de Roraima (...) du 29 août au 12 septembre", a annoncé mardi dans la soirée le président brésilien Michel Temer, "afin de garantir la sécurité des citoyens brésiliens mais aussi des immigrants vénézuéliens qui fuient leur pays".
M. Temer a ajouté que la situation migratoire était "tragique" et "menaçait l'harmonie de quasiment tout le continent". "Ce n'est pas seulement le Brésil qui endure ses conséquences, mais le Pérou, l'Equateur, la Colombie et d'autres pays d'Amérique latine", a-t-il dit lors d'une allocution télévisée.
Le chef de l'Etat brésilien n'a pas précisé combien d'hommes étaient concernés par ce décret pris une dizaine de jours après une explosion de colère contre les migrants dans la localité frontalière de Pacaraima, où une foule d'habitants a chassé des centaines de Vénézuéliens et brûlé leurs biens.
"Pays en guerre"
La situation humanitaire à la frontière est "comparable à celle de pays en guerre", commente à l'AFP Mauricio Santoro, professeur de relations internationales à l'Université de l'Etat de Rio de Janeiro.
Le Brésil a accueilli quelque 60.000 réfugiés à ce jour et le Pérou, qui s'attend à en recevoir un nombre total d'un demi-million, vient de restreindre leur accès à son territoire.
D'ores et déjà, la Colombie et le Pérou ont indiqué qu'ils allaient se coordonner sur l'aide à apporter aux centaines de milliers de migrants déjà présents sur leur sol et encore à venir, premier pas d'une politique régionale face à l'exode généré par la crise vénézuélienne.
Sur son territoire, le Pérou a décrété mardi l'état d'urgence sanitaire pour 60 jours dans trois districts de la région de Tumbes, à la frontière avec l'Equateur, en raison de l'arrivée massive de migrants vénézuéliens, mais sans préciser la teneur des mesures.
L'Equateur a lui avancé au 3 et 4 septembre une réunion régionale sur la vague migratoire vénézuélienne à laquelle sont invités treize pays. Elle devait initialement se tenir les 17 et 18 septembre, mais il a été décidé de l'avancer en raison de l'urgence de la situation, a déclaré mardi le ministre équatorien des Affaires étrangères, José Valencia.
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