Pesticides les plus utilisés au monde
Disponibles depuis le milieu des années 1990, les néonicotinoïdes, ensemble de sept insecticides neurotoxiques (acétamipride, clothianidine, imidaclopride, thiaclopride, thiaméthoxame, nitenpyrame et dinotéfurane), sont devenus les pesticides les plus utilisés dans le monde.
S'ils peuvent être utilisés en pulvérisation, en France ils servent principalement de manière préventive, en enrobant les semences. La substance, dite "systémique", est absorbée par la plante et se propage à tous ses tissus, y compris le pollen.
Betteraves, blé, colza, arbres fruitiers, vigne... Ils sont utilisés pour débarrasser les cultures des chenilles, cochenilles, pucerons ou insectes mangeurs de bois.
"Tueur d'abeilles"
Comme tout insecticide, à certaines doses, les néonicotinoïdes tuent les insectes, donc les abeilles.
Depuis les années 2000, des scientifiques s'inquiètent du fait que même à faible dose, ces substances qui s'attaquent au système nerveux des insectes affectent les pollinisateurs (abeilles et bourdons désorientés, sperme des mâles altéré...).
Les apiculteurs français constatent une hausse de la mortalité dans leurs ruches depuis l'arrivée des néonicotinoïdes. Mais "aucun élément scientifique rigoureux" ne prouve qu'ils sont la première cause de mortalité des abeilles, note le directeur scientifique de l'Institut de l'abeille Axel Decourtye.
Interdits, avec dérogations
L'UE a décidé en avril d'interdire pour les cultures de plein champ l'utilisation de trois substances (clothianidine, thiaméthoxame et imidaclopride), objet de restrictions depuis 2013. La décision, qui permettra les usages sous serre, entrera en vigueur complètement le 19 décembre.
La France va plus loin. La loi biodiversité de 2016 prévoit l'interdiction des néonicotinoïdes à partir de ce 1er septembre. Un récent décret d'application précise que les cinq substances jusqu'alors autorisées en Europe pour des usages phytosanitaires sont concernées (les trois visés par l'UE, plus thiaclopride et acétamipride) .
Des dérogations sont possibles au cas par cas jusqu'au 1er juillet 2020. Mais elles ne seront délivrées que pour des produits à base d'acétamipride, et dans de "faibles volumes", assure le ministère de la Transition écologique.
Des dérogations inacceptables pour les ONG, qui réclament l'interdiction d'autres pesticides. "Ne nous limitons pas à cette famille. Beaucoup d'autres devraient être interdits", plaide François Veillerette, de Générations Futures.
Dans son viseur notamment des produits parfois appelés "néonicotinoïdes de nouvelle génération": la flupyradifurone, pas autorisée en France, et le sulfoxaflor, substance active de deux produits dont l'association a fait suspendre la vente par la justice l'an dernier.
La loi alimentation adoptée en première lecture prévoit l'extension de l'interdiction des néonicotinoïdes aux substances chimiques ayant des modes d'action identiques. Si elle est adoptée définitivement, un nouveau décret devrait compléter la liste.
Les néonicotinoïdes restent néanmoins autorisés pour les usages non phytosanitaires, comme biocides et médicaments vétérinaires, notamment les produits anti-puces pour chiens et chats.
Des alternatives ?
Les agriculteurs se retrouvent dans une impasse "dramatique", dénoncent la FNSEA et d'autres syndicats agricoles, assurant ne pas avoir de solutions de remplacement.
Selon un rapport récent de l'Anses, il existe des alternatives "suffisamment efficaces, et opérationnelles", chimiques ou non chimiques, pour la grande majorité des 130 usages phytosanitaires des néonicotinoïdes.
L'agence plaide pour une "lutte intégrée": pas de traitement prophylactique, surveillance des cultures, priorité aux méthodes non chimiques, pesticides chimiques seulement si les ravageurs dépassent certains "seuils de nuisibilité". Mais elle reconnaît que "l'impact sur l'activité agricole de l'interdiction des néonicotinoïdes est difficile à anticiper".
Et l'homme ?
Les néonicotinoïdes se retrouvent dans le sol et l'eau.
Pêches, laitues, tomates... L'acétamipride et l'imidaclopride sont présents respectivement dans 5% et 4% des échantillons alimentaires recueillis en Europe, selon un rapport de 2016 de l'Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA).
Mais en février 2018, l'Anses assurait que les données disponibles "ne mettent pas en évidence d'effet nocif pour la santé humaine", à condition que les consignes d'utilisation soient respectées.
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