En kilt et guêtres blanches, un soldat du Canadian Scottish, un bataillon de l'infanterie canadienne, joue une "Lamentation" dans le cimetière britannique de Loos-en-Gohelle (Pas-de-Calais), où reposent près de 2.900 soldats du Commonwealth.
Sur une pelouse parfaitement entretenue, parsemée de bosquets de lavande, quatre nouvelles stèles blanches se détachent.
"Le fait qu'on honore leur mémoire, cent ans après (...) est bouleversant", confie à l'AFP Dolores Adams. Émue aux larmes, cette octogénaire américaine a fait le voyage de Seattle (nord-ouest des Etats-Unis) pour assister aux obsèques de son aïeul William Del Donogan, tué à 20 ans.
Comme Henry Edmonds Priddle (mort à 33 ans), John Henry Thomas (28 ans) et Archibald Wilson (25 ans), qui reposent désormais à ses côtés, le soldat Donogan était porté disparu depuis août 1917, tombé lors de combats archarnés pour reprendre aux troupes allemandes la cote 70, une colline stratégique surplombant la ville de Lens.
Cette offensive, menée par les troupes canadiennes entre les 15 et 25 août, avait fait plus de 10.000 morts et blessés dans leurs rangs, dont plus de 1.300 sans sépulture connue.
Retrouvés entre 2010 et 2016 lors d'opérations de destruction d'anciennes munitions et d'un chantier de construction aux environs de Lens, les restes des quatre soldats ont été mis en terre lors d'une cérémonie très solennelle organisée par les Forces armées canadiennes. Le sous-préfet de Lens, Jean-François Raffy, représentait la France aux côtés du maire de Loos-en-Gohelle, Jean-François Caron.
Arrière-petit-neveu d'Archibald Wilson, Gavin Wood, 74 ans, ignorait son existence jusqu'à la découverte de son corps. Il connaissait en revanche celle de deux des frères d'Archibald, tués comme lui lors de la Première Guerre mondiale, mais enterrés depuis longtemps.
"Tant d'hommes ont été tués ou portés disparus dans ces guerres, certains jamais identifiés, alors qu'ils avaient donné leur vie, leur avenir pour se battre pour un monde libre", observe-t-il.
700.000 disparus sur le front ouest
Souvent enterrées à la hâte à proximité des tranchées ou ensevelies par un tir d'obus, certaines dépouilles réapparaissent, au fil du temps.
Plus d'une vingtaine de corps de soldats ont ainsi été exhumés depuis novembre sur le site du futur hôpital de Lens, selon la mairie de Loos-en-Gohelle.
Et plus de 100 ans après leur mort, les pays belligérants continuent à tenter d'identifier leurs soldats inconnus.
"Pour nous, cela peut sembler un peu invraisemblable, mais un soldat qui n'est pas retrouvé n'est pas mort", souligne le major-général Nicolas Eldaoud, 52 ans, venu représenter l'armée canadienne à la cérémonie. "Le régiment ne peut pas finalement fermer le livre de son histoire sachant que tous ses soldats n'ont pas été retrouvés."
Une trentaine de militaires canadiens, dont la moitié tués pendant la Grande Guerre, ont ainsi été identifiés depuis le lancement en 2007 d'un programme d'identification au ministère canadien de la Défense, explique Sarah Lockyer, sa responsable.
"Cela peut prendre de quelques mois à plusieurs années", sept ans dans le cas d'un des soldats inhumés jeudi, en combinant analyse anthropologique médico-légale, recherche historique et analyse génétique (ADN), explique-t-elle.
"Et présentement, j'ai 32 autres squelettes que j'essaie d'identifier, dont 31 sont de la Première Guerre mondiale et un de la Seconde Guerre mondiale".
Les historiens estiment à 700.000 (sur 3,5 millions de morts) le nombre de soldats de toutes nationalités portés disparus sur le front ouest (Belgique, nord de la France, Alsace), théâtre principal des combats de la Guerre de 14-18.
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