Bienvenue au Girls Auto Clinic.
Sur fond de musique rock en cette chaude journée d'août, la cheffe d'équipe Sue Sweeney, bandana noué sur le front, s'affaire sous un pont élévateur pour inspecter une voiture. A côté d'elle, une mécanicienne lui passe ses outils.
Au Girls Auto Clinic, des femmes ont décidé de se réunir pour s'affranchir des clichés sexistes sur le monde des voitures, dominé par les hommes.
"J'étais une femme qui travaillais dans l'industrie automobile, j'y ai détesté toutes mes expériences professionnelles", explique la pétillante fondatrice du garage, Patrice Banks.
"J'avais toujours l'impression qu'il fallait qu'un homme vienne avec moi chez le mécanicien, sinon on m'arnaquait".
En 2012, à l'âge de 31 ans, elle a décidé de tout plaquer: après avoir quitté son travail dans un laboratoire d'ingénierie, elle est devenue mécanicienne.
Au début, le projet était de créer un atelier de mécanique réservé aux femmes, une fois par mois. Mais rapidement, son business est devenu florissant.
L'année dernière, elle a ainsi officiellement ouvert son Girls Auto Clinic, à côté duquel elle a également créé un salon de manucure particulièrement prisé de la clientèle du garage, très majoritairement (75%) féminine.
Certaines n'hésitent même pas à parcourir quelques kilomètres de plus pour venir dans ce garage si particulier.
"Je voulais créer une entreprise où les femmes se sentent les bienvenues et où elles se sentent émancipées", poursuit dans un sourire Patrice Banks, qui a même raconté son parcours dans un livre sorti récemment.
"Si nous sommes les principaux clients, nous ne devrions pas nous sentir maltraitées ou mal comprises".
Cinq nouveaux garages
Aux Etats-Unis, on compte autant de conductrices que de conducteurs selon les statistiques officielles du ministère des Transports. Les femmes, cependant, ne comptent que pour 3% des techniciens et mécaniciens automobiles.
Sauf au Girls Auto Clinic, où neuf des dix employés sont des employées et s'appellent "elle-caniciennes" ("She-canics" en anglais).
"Je peux venir, être moi, m'habiller comme je veux et personne ne va me juger en observant si j'ai l'air assez féminin ou trop masculin selon le type de travail que je vais faire", explique Sue Sweeney, 42 ans dont 23 années passées à travailler dans ce milieu au cours desquelles aucun cliché ne lui a été épargné.
Un ancien collègue lui a ainsi assené un jour qu'elle devrait "être pieds nus et enceinte à la cuisine", et non dans un atelier.
Les railleries, assure-t-elle, ne l'ont jamais découragée.
"Elle est formidable", dit d'elle sa patronne Patrice Banks, alors que Sue Sweeney installe un moteur dans une voiture.
"Et je me demande, qui a bien pu ne pas la retenir?".
Patrice Banks espère bien capitaliser sur le succès de son entreprise à Upper Darby, en Pennsylvanie, pour monter une franchise nationale qui fera référence.
Car l'initiative ne tient pas seulement que de la lutte contre les clichés, elle est également motivée par une réelle logique économique.
"Avoir une entreprise possédée et gérée par des femmes, avec des employées entraînées me semble être une bonne idée", note Arthur Wheaton, professeur à l'Université Cornell, spécialisé dans le secteur de l'industrie.
"Il y a certainement une possibilité de croissance économique dans le secteur de la réparation automobile puisque de moins en moins de personnes se tournent vers les emplois qualifiés", poursuit-il.
Patrice Banks a ainsi récemment lancé une campagne de financement participatif pour ouvrir cinq nouveaux garages d'ici 2020.
"Y a-t-il quelque chose de plus important en ce moment que l'émancipation des femmes?", interroge-t-elle.
"Nous surfons sur cette vague, les gens attendent des initiatives comme ça. Le moment est venu".
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