Cette nomination intervient après plus de trois mois de recherches ardues de l'homme providentiel qui pourrait donner un nouvel élan au groupe après le départ fracassant le 4 mai de son PDG Jean-Marc Janaillac, désavoué par le personnel consulté au sujet d'un accord salarial.
"C'est une chance pour Air France-KLM d'attirer un dirigeant de cette dimension qui dispose d'une importante expérience acquise au cours des 19 dernières années passées chez Air Canada, d'un sens du dialogue et d'une grande capacité de transformation", ont estimé le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et la ministre des Transports Elisabeth Borne.
Le Canadien, âgé de 46 ans, prendra la direction générale exécutive du groupe "au plus tard le 30 septembre 2018", tandis que l'évolution des contours de la présidence non exécutive du groupe sera annoncée "dans les meilleurs délais". M. Janaillac occupait les fonctions de PDG du groupe, un comité de direction avec une présidente non exécutive (Anne-Marie Couderc) l'avait remplacé à titre intérimaire.
La compagnie Air France traverse une grave crise sociale depuis plusieurs mois, liée à des revendications salariales et marquée par 15 jours de grève entre février et juin qui ont coûté 335 millions au groupe.
Un début de polémique s'est fait jour jeudi soir au sujet de la rémunération accordée à M. Smith qui, selon plusieurs médias, a été triplée par rapport à celle de M. Janaillac, à plus de 3 millions d'euros par an.
Le député UDI Bertrand Pancher a jugé dans un entretien jeudi soir au Parisien ce montant "déplorable pour l'image de la compagnie auprès de ses salariés et des Français en général". "Si ce salaire est annexé sur les résultats futurs de la compagnie, pourquoi pas", a-t-il tempéré. "Mais si c'est un salaire fixe, c'est scandaleux!", a-t-il ajouté, en souhaitant une "explication de texte" du gouvernement.
Le groupe Air France-KLM s'est refusé à tout commentaire à ce sujet.
Jeudi matin, l'intersyndicale d'Air France (CGT, FO, SUD, SNPNC, Unsa-PNC, CFTC, SNGAF, SNPL, Alter), qui a mené la grève, a fait part de sa plus ferme opposition à la nomination d'un "dirigeant étranger" soupçonnant que sa candidature soit "poussée par un groupe industriel concurrent", en référence à Delta Air Lines.
La compagnie américaine est entrée au capital du groupe tout comme China Eastern à l'automne dernier. Elles détiennent chacune 8,8% du capital, au côté de l'Etat français (14,3%) et des employés (3,90%) notamment.
Menaces de grèves
Après l'annonce de la nomination, Karim Taïbi, de FO, a dit à l'AFP attendre de Benjamin Smith qu'il "résolve immédiatement le conflit sur les salaires". "L'intersyndicale est prête à négocier très très rapidement avec M. Smith", a-t-il assuré.
De son côté, Christophe Dewatine, secrétaire général de la CFDT, a souligné que c'était la "première fois de son histoire" qu'Air France allait avoir "un dirigeant non-issu du groupe et non français". "On attend de voir quelle est sa feuille de route, son projet. On ne connaît pas ses qualités, ni ses défauts", a ajouté le syndicaliste.
Le syndicat néerlandais de pilotes VNV a manifesté un optimisme prudent, son porte-parole Joost van Doesburg affirmant à l'AFP que son organisation était "très heureuse" que le groupe ait enfin un nouveau patron, notant qu'il "a beaucoup d'expérience dans une compagnie de bonne renommée, c'est un plus".
M. Smith arrive avec la réputation d'un homme de dialogue. Il a créé en outre la low-cost du groupe canadien, Air Canada Rouge.
Cité dans le communiqué, il a dit souhaiter "gagner la confiance et le respect des équipes d'Air France-KLM pour que nous travaillions et réussissions ensemble dans cette industrie fortement compétitive et en évolution très rapide".
Le groupe franco-néerlandais est soumis à une très vive concurrence de la part des compagnies du Golfe et des nouvelles compagnies low-cost long-courrier.
Le nouveau dirigeant du groupe aura fort à faire pour ramener la paix sociale au sein de la compagnie française alors que la menace de nouvelles grèves plane.
Dimanche, Philippe Evain, président du premier syndicat de pilotes d'Air France, a demandé dans une interview au Parisien la reprise par le futur patron de la négociation avortée avec l'intersyndicale, menaçant de "15 jours de grève".
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