Berat Albayrak, qui est aussi le gendre du président Recep Tayyip Erdogan, doit s'adresser à 13H00 GMT à plusieurs milliers d'investisseurs originaires des Etats-Unis, d'Europe et d'Asie lors d'une téléconférence inédite qui s'annonce comme un test de crédibilité.
Berat Albayrak est le mari de la fille aînée du président turc.
"C'est la dernière chance pour M. Albayrak de prouver trois choses : qu'il comprend ce qui se passe, qu'il peut réagir en conséquence, et qu'il a de l'influence sur M. Erdogan", explique à l'AFP une source diplomatique européenne qui a requis l'anonymat.
Avant ce rendez-vous qui sera scruté par les marchés, la livre turque, qui s'est effondrée la semaine dernière sur fond de crise diplomatique avec les Etats-Unis, rebondissait pour le troisième jour de suite.
Elle gagnait ainsi environ 2,2% de sa valeur face au dollar à 11H30 GMT, s'échangeant à 5,8 contre un billet vert, même si elle est loin d'effacer l'importante perte de ces derniers jours.
La livre semble s'être stabilisée depuis mardi sous l'effet de mesures prises par la banque centrale et de nouvelles barrières dressées par le régulateur turc des banques (BDDK) pour limiter la spéculation sur la devise turque.
Risque de contraction
Cette dernière, qui a perdu 40% de sa valeur cette année, a connu la semaine dernière une spectaculaire débâcle qui a fait souffler un vent de panique sur les places boursières mondiales redoutant un effet contagieux.
Cet effondrement a été accéléré par l'escalade des tensions entre la Turquie et les Etats-Unis qui ont pris des sanctions réciproques et augmenté leurs tarifs douaniers respectifs pour certains produits.
Malgré le rebond de la livre de ces derniers jours, les économistes restent préoccupés par la dispute entre Ankara et Washington, liée notamment à la détention d'un pasteur américain en Turquie, et par la mainmise de M. Erdogan sur l'économie.
Les marchés ont sévèrement sanctionné le refus de la banque centrale de relever ses taux d'intérêt le mois dernier, en dépit de la chute de la livre et d'une inflation galopante. M. Erdogan, partisan de la croissance à tout prix, s'y oppose fermement.
Les investisseurs seront donc attentifs à d'éventuels signaux concernant les taux lors de la conférence de M. Albayrak jeudi.
"Jusqu'à présent, la Turquie ne semble (...) pas modifier ses politiques assez rapidement", relève Holger Schmieding, économiste chez Berenberg.
"En conséquence, le risque est grand que l'économie turque se contracte pendant un certain temps en l'absence d'un changement crédible et rapide de politique", poursuit-il.
Erdogan "pragmatique"
Dans la tourmente financière, la Turquie a reçu un soutien de poids mercredi : l'émir du Qatar, Cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, a promis lors d'un entretien avec M. Erdogan à Ankara que son pays investirait 15 milliards de dollars dans ce pays.
Signe que la crise avec Washington incite par ailleurs Ankara à renouer avec l'Europe, M. Erdogan s'est entretenu au téléphone mercredi avec la chancelière allemande Angela Merkel et devait également s'entretenir avec son homologue français Emmanuel Macron jeudi.
Par ailleurs, la justice turque a ordonné mardi la libération de deux soldats grecs et mercredi du président d'Amnesty International en Turquie, des développements inattendus dans deux affaires qui ont contribué à tendre les rapports entre Ankara et l'Europe.
"Ces libérations ne sont évidemment pas une coïncidence", remarque la source diplomatique européenne.
"Mais les causes sous-jacentes (de la défiance) sont toujours là: on n'a toujours pas de garantie sur l'indépendance de la banque centrale ou de la justice", poursuit cette source. "Cela montre juste qu'Erdogan est très pragmatique quand il est sous pression économique".
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