Parmi les produits visés par cette forte hausse figurent les véhicules de tourisme, dont les tarifs douaniers s'élèvent désormais à 120%, certaines boissons alcoolisées (140%), le tabac (60%) ou encore le riz et des produits cosmétiques.
D'après la ministre turque du Commerce Ruhsar Pekcan, le montant des nouveaux tarifs douaniers annoncés mercredi s'élève à 533 millions de dollars.
Cette décision, annoncée dans un décret signé par le président Recep Tayyip Erdogan, survient alors que Washington et Ankara traversent une crise diplomatique ayant conduit ces deux alliés au sein de l'Otan à s'imposer des sanctions réciproques en août.
Le vice-président turc Fuat Oktay a précisé mercredi que la hausse des tarifs douaniers était un acte de "représailles" contre les "attaques délibérées de l'administration américaine sur (l')économie" turque.
Le président américain Donald Trump avait notamment annoncé la semaine dernière le doublement des tarifs douaniers sur l'acier et l'aluminium turcs.
Ces tensions ont précipité l'effondrement ces derniers jours de la livre turque qui a perdu plus de 40% de sa valeur face au billet vert et à l'euro depuis le début de l'année.
Cependant, la Turquie a reçu un soutien de poids mercredi avec une promesse de 15 milliards de dollars d'investissements du Qatar formulée lors d'une rencontre à Ankara entre M. Erdogan et le dirigeant du richissime émirat gazier, Cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani.
Cette annonce, faite par la présidence turque qui a rendu hommage à l'"amitié et la solidarité" du Qatar, a accéléré la remontée de la livre qui gagnait quelque 5% en valeur face au billet vert en fin de journée.
La devise turque semblait en voie de relative stabilisation cette semaine sous l'effet de mesures de la banque centrale et de nouvelles restrictions aux échanges financiers ("swap") annoncées mercredi par l'autorité des banques (BDDK) afin de contrer les spéculations.
Pasteur toujours retenu
La hausse des tarifs mercredi survient au lendemain d'un spectaculaire appel de M. Erdogan, qui dénonce une "guerre économique", à boycotter les appareils électroniques manufacturés par les Etats-Unis.
Les turbulences entre la Turquie et les Etats-Unis se sont renforcées au cours des derniers mois avant de virer à l'orage en juillet à cause de la détention en Turquie du pasteur américain Andrew Brunson.
Ce dernier est accusé par Ankara d'espionnage et d'activités "terroristes", ce qu'il nie en bloc. Après plus d'un an et demi d'incarcération, il a été placé en juillet en résidence surveillée.
Un tribunal truc a rejeté mercredi un nouveau recours du pasteur demandant la levée de son assignation à résidence.
La veille, la Maison Blanche avait fait savoir que M. Trump ressentait "beaucoup de frustration du fait que le pasteur ne soit pas libéré".
En parallèle de sa fermeté envers les Etats-Unis, la Turquie semble cependant soucieuse de ménager ses autres partenaires et alliés.
Spectre d'une récession
Signe que la crise avec Washington pourrait pousser Ankara à renouer avec l'Europe, M. Erdogan s'est entretenu au téléphone mercredi avec la chancelière allemande Angela Merkel, qu'il doit rencontrer fin septembre à Berlin.
D'après un responsable turc, les deux dirigeants ont convenu d'une rencontre "dans les prochains jours" entre le patron de l'économie turque Berat Albayrak, gendre de M. Erdogan, et les ministres allemands de l'Economie et celui des Finances.
Par ailleurs, la justice turque a ordonné mardi la libération de deux soldats grecs et mercredi du président d'Amnesty International en Turquie, des développements inattendus dans deux affaires qui ont contribué à tendre les rapports entre Ankara et l'Europe.
Outre les tensions avec Washington, les marchés s'inquiètent aussi de la mainmise de M. Erdogan sur l'économie, notamment depuis sa réélection en juin.
Les économistes critiquent le refus de la banque centrale de redresser ses taux malgré une forte inflation (près de 16% en juillet). M. Erdogan s'oppose fermement à une telle mesure, malgré les appels répétés des marchés en ce sens.
"Le plongeon de la livre turque va vraisemblablement faire grimper l'inflation à plus de 20% et faire basculer l'économie dans une récession dans les mois à venir", s'alarme Capital Economics.
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