Les résultats du duel entre le président sortant et favori Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) et l'opposant Soumaïla Cissé doivent être proclamés en milieu de semaine par la Cour constitutionnelle, mais "d'ores et déjà, nous (les) rejetons", a lancé à ses partisans M. Cissé du balcon de son siège de campagne.
La mission d'observation de l'Union européenne doit présenter son rapport préliminaire sur le déroulement du scrutin du second tour mardi à 11h00 (heure locale et GMT).
M. Keïta devrait ensuite s'exprimer depuis son siège de campagne en début d'après-midi.
Le vainqueur entrera en fonction début septembre avec la lourde tâche de relancer l'accord de paix conclu en 2015 avec l'ex-rébellion à dominante touareg, dont l'application accumule les retards, dans ce vaste pays du Sahel toujours confronté à la menace jihadiste malgré cinq années d'interventions militaires internationales.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, en grande partie chassés ou dispersés par une intervention militaire lancée en janvier 2013 à l'initiative de la France, qui se poursuit actuellement. Malgré l'accord de paix, les violences ont persisté et ont progressé vers le centre et le sud du pays, puis au Burkina Faso et au Niger voisins.
Interrogé début juin par l'AFP, M. Cissé avait estimé qu'il faudrait "absolument éviter une crise électorale". Mais alors qu'en 2013 il avait reconnu sa défaite, déjà face M. Keïta, avant même l'annonce des résultats, il n'a cessé cette fois d'accuser le camp d'"IBK" de profiter de l'insécurité dans le centre et le Nord pour truquer le scrutin.
"J'en appelle à tous les Maliens à se lever (...) Nous n'accepterons pas la dictature de la fraude", a lancé lundi à ses militants M. Cissé, ancien ministre des Finances de 68 ans, accusant le pouvoir d'avoir "attaqué" et mis hors d'usage le système de comptabilisation électorale de l'opposition dans la nuit de dimanche à lundi, alors qu'il était crédité selon lui de 51,93% des suffrages contre 47,53% pour le président sortant.
"La responsabilité de ce qui va arriver dans le pays est dans le camp du président de la république", a averti M. Cissé lors d'un bref entretien à des médias, dont l'AFP.
Il a en outre déploré la brève arrestation dimanche de six membres de son équipe de communication, dont quatre Français, par les services de renseignement maliens qui ont saisi leurs ordinateurs et téléphones.
"Pourquoi, si ce n'est pour cacher quelque chose ?", a demandé M. Cissé. Cinq hommes ont été libérés sans charges au bout de deux heures, mais l'opposition est toujours, 24 heures plus tard, "sans nouvelles" du sixième, un Ivoirien.
"Ca n'a rien à voir avec le candidat Cissé, absolument rien à voir. L'élection se fait, mais le travail de sécurité se fait aussi", a fait valoir le ministre de la Sécurité publique, le général Salif Traoré. Une enquête a été "ouverte".
Baisse des incidents
Le second tour s'était pourtant déroulé dans un climat plus apaisé que le premier. Seuls 490 bureaux de vote - sur 23.000 - n'ont pu ouvrir, soit moitié moins que le 29 juillet, a indiqué le général Traoré.
"Nous avions un peu plus de 3,7% des bureaux qui n'avaient pas fonctionné normalement" lors du premier tour, dont M. Keïta était sorti largement en tête avec près de 42% des voix pour 17,78% à son concurrent, a noté le général Traoré.
Il a estimé à 2,1% le nombre de bureaux restés fermés dimanche. Il a attribué ce succès à la "montée en puissance" de l'armée qui avait déployé 36.000 hommes, 6.000 de plus qu'au premier tour.
La grande majorité des bureaux restés fermés (440 sur 490) étaient à nouveau situés dans la région de Mopti (centre), en proie à des violences ethniques attisées par des groupes jihadistes. Les autres se trouvent dans le Nord, dont 23 dans la région de Tombouctou, où l'Etat est peu ou pas présent et où un président de bureau de vote a été tué par six jihadistes présumés lors du plus grave incident de la journée.
Le scrutin, déterminant pour l'avenir du Sahel, s'est déroulé dans la relative indifférence de la population entre météo pluvieuse, risques de violences et manque de suspense.
L'Union européenne a appelé à la "transparence" dans chaque étape de la compilation des résultats.
Selon le camp de M. Cissé, des bulletins de vote "circulaient" ces derniers jours, preuve que des bourrages d'urnes étaient en préparation.
Des journalistes de l'AFP ont constaté que dans au moins six bureaux de vote de Bamako, les procès-verbaux électoraux avaient été préremplis et signés avant même la fin du vote. Ibrahim Boubacar Keïta a répliqué aux accusations en dénonçant des "manoeuvres" de l'opposition.
Notant que les deux camps se sont accusés de "fraude ou de tentatives de fraude", la mission d'observation de l'Union africaine a indiqué lundi, "à ce stade", ne détenir "aucun élément tangible" démontrant de quelconques irrégularités.
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