Des milliers de jeunes femmes avaient bravé le froid et la pluie pour être là, devant le Congrès. A 02h49 (05h49 GMT), quand le résultat du vote des sénateurs s'est affiché, la déception a envahi la foule même si l'issue négative était attendue depuis plusieurs heures.
"Être si proche de la légalisation et qu'elle se dérobe, c'est rageant", déclare à l'AFP Mailen, une manifestante de 24 ans.
Le projet de loi avait été adopté par la chambre des députés, il ne manquait plus que l'aval du Sénat et l'Argentine allait se convertir en 3e pays d'Amérique latine à autoriser l'IVG, après Cuba (1965) et l'Uruguay (2012).
"Je suis indignée par cette marché arrière. La mobilisation a été forte, nous avons fait un grand pas en avant. Dans la rue, l'avortement est légal, dans les quartiers l'avortement est légal, ceux qui ne se sont pas rendus compte sont ceux qui sont au Sénat", regrette la jeune femme, militante de l'organisation Miguelito Pepe.
Aussitôt après la diffusion des résultats, les manifestantes ont souligné que la mobilisation n'était pas terminée. "La lutte continue", "que l'IVG soit loi" ont scandé les manifestantes alors que les sénateurs quittaient l'hémicycle.
2020
"On va continuer de se battre, comme on le fait depuis de nombreuses années", assure Sofia Spinelli, 26 ans.
"On a vécu des journées historiques. Au début, nous étions nombreuses mais pas autant. On a gagné dans la rue, mais la représentation politique n'est pas fidèle à ce qui se passe dans la rue", déplore-t-elle.
Pour Vilma Ripoll, dirigeante d'un parti de gauche, "les sénateurs regardent du côté du pape et du Vatican. Il faut obtenir la séparation de l'Eglise et de l'Etat", alors que l'Argentine est officiellement un pays laïque.
Mercredi avant le vote, l'avocate Nelly Minyersky, 89 ans, une figure de la Campagne nationale pour l'avortement légal, sûr et gratuit avait elle aussi salué le chemin parcouru au cours des deux dernières années. "Nous avons mobilisé un million et demi de jeunes. Si ce n'est pas ce jeudi, ce sera l'an prochain".
Le débat sur la légalisation de l'avortement peut retourner au Sénat dans un an, délai minimum. Mais comme l'élection présidentielle est programmée pour octobre 2019, il est peu probable qu'une question aussi controversée s'invite au Congrès en pleine campagne électorale. Il faudra plutôt attendre 2020.
Chaque année, environ 500.000 avortements sont pratiqués en Argentine dans la clandestinité. dans des cliniques privées modernes ou dans des conditions d'hygiène déplorables, en fonction des possibilités économiques.
"Personne ne t'oblige à avorter, ne m'oblige pas à accoucher" a écrit sur une pancarte Sol Barel, une étudiante vétérinaire de 24 ans, un masque vert peint sur le visage.
Succès bleu ciel
A l'autre extrémité de la place du Congrès, les membres des organisations anti-avortement ont exulté à la publication des résultats du vote.
En réaction au foulard vert des pro-IVG, les opposants au projet de loi ont créé un foulard bleu ciel et imprimé dessus leur slogan "Sauvons les deux vies".
"La démonstration est faite, l'Argentine est pro-vie pour toujours, nous sommes ici pour défendre la vie, pour défendre l'enfant", témoigne Mariana Rodriguez Varela.
Avant le vote, des feux d'artifices ont été tirés du camp des opposants au projet de loi.
"Le plus dangereux dans ce projet de loi, c'est qu'il minimisait l'importance de la vie humaine", considère Jorge Enriquez, un retraité.
"J'enseigne le catéchisme et pour moi depuis la conception, il y a une vie humaine", confie Violeta Torres, 52 ans, mère de 4 enfants et 4 fois grand-mère, venue de La Matanza, une banlieue populaire de Buenos Aires.
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