Alors que les autorités annoncent une riposte énergique, une marée de partisans du pouvoir, portant des portraits de M. Maduro, ont défilé lundi jusqu'au palais présidentiel de Miraflores à Caracas.
Plusieurs centaines de chavistes ont attendu pendant des heures une apparition de M. Maduro, annoncée par le ministère de la Communication, mais le président n'est pas venu. Le ministère n'a pas donné d'explication à son absence.
"Nous sommes venus soutenir le président après l'attaque terroriste dont il a été la cible", a déclaré à l'AFP Francisca Harvey, 53 ans, alors qu'elle se dirigeait vers l'estrade où l'on pouvait lire sur un écran géant "Maduro pour longtemps".
"J'espérais le voir aujourd'hui, mais on imagine qu'il n'est pas sorti pour des raisons de sécurité", déclarait Margot Sivira, 36 ans, qui s'est présentée comme "une combattante sociale".
Une autre manifestante, Linda Estrada, 48 ans, a elle aussi justifié l'absence de M. Maduro. "Le président ne peut pas venir ici, on ne va pas leur donner le plaisir de pouvoir le tuer", a-t-elle dit.
Depuis l'estrade, le numéro deux du camp présidentiel, Diosdado Cabello, a mis en garde contre les conséquences d'un éventuel assassinat du président. "Ne pensez pas, messieurs de la bourgeoisie, des partis d'opposition, que vous pourriez gouverner un seul instant. Le Venezuela serait à feu et à sang!", a-t-il lancé.
Selon les autorités vénézuéliennes, deux drones chargés chacun d'un kilo de C4, un puissant explosif militaire, ont explosé à proximité de la tribune présidentielle lors d'une cérémonie militaire dans le centre de Caracas.
Rapidité de la réponse des forces de l'ordre, contradictions dans les déclarations des autorités, éventuelles manipulations: l'affaire soulève de nombreuses questions. M. Maduro affirme régulièrement être la cible de complots en tous genres que ses services de sécurité parviendraient à déjouer.
- "Connexions internationales" -
Lors d'une conférence de presse lundi, le procureur général du Venezuela Tarek William Saab a mis en garde contre toute nouvelle tentative de viser le gouvernement.
La justice "poursuivra dans le cadre de la loi ceux qui conspirent contre la paix civile", a averti le magistrat. "Que ces faits servent, une fois pour toutes, à mettre un terme à toute tentative de porter atteinte à la paix de façon violente", a-t-il déclaré.
M. Saab a confirmé que deux hommes avaient été arrêtés "en flagrant délit" alors qu'ils pilotaient un des drones depuis un véhicule à proximité de l'événement. Cet engin a explosé après avoir heurté un immeuble, selon les autorités.
Contrairement à ce qu'il avait annoncé dimanche, le procureur général n'a pas révélé les identités des personnes interpellées.
Pour l'heure, six personnes ont été arrêtées dans cette affaire, d'après le ministre de l'Intérieur Nestor Reverol.
"On sait d'où ont été pilotés les drones, des preuves y ont été recueillies (...) Tous les auteurs des faits ont été identifiés ainsi que leurs complices", a affirmé le magistrat.
M. Saab a également assuré que les personnes "qui ont fabriqué les engins" explosifs ont été identifiées et que "les premières connexions internationales ont été établies".
- Complots -
Peu après les faits, M. Maduro a mis en cause son homologue colombien, qui passe mardi les rênes du pouvoir à son successeur Ivan Duque. Evoquant des "financiers" non identifiés qui résideraient aux Etats-Unis, il a également mis en cause "l'ultra-droite", se référant ainsi à l'opposition vénézuélienne.
A Bogota, le gouvernement colombien a qualifié d'"absurde" les allégations de Caracas
Le président Juan Manuel Santos lui-même a qualifié d'"insolite" la version de Caracas "selon laquelle je serais de mèche avec le renseignement américain, avec la droite vénézuélienne, à ourdir des complots pour assassiner le président du Venezuela. Voyons !".
Les Etats-Unis, qui entretiennent des relations très tendues avec le Venezuela, ont aussi nié toute implication.
Un mystérieux groupe rebelle, baptisé "Mouvement national des soldats en chemise" a revendiqué l'action dans un communiqué sur les réseaux sociaux.
L'opposition a exprimé son inquiétude devant la fermeté des avertissements des autorités, craignant une nouvelle vague de répression. Selon les adversaires de M. Maduro, le pays compte 248 "prisonniers politiques".
C'est une "tentative de criminaliser ceux qui s'opposent légitimement et démocratiquement et de renforcer la répression", a dénoncé la plateforme d'opposition Frente Amplio.
L'événement continue à susciter des réactions internationales. Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres "est préoccupé", a indiqué lundi un porte-parole. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a lui exprimé son soutien à M. Maduro lors d'un entretien téléphonique.
L'incident est survenu dans un contexte social et politique tendu. Tous les voyants économiques sont au rouge vif. L'inflation pourrait atteindre 1.000.000% fin 2018, selon le Fonds monétaire international (FMI), et le PIB devrait s'effondrer de 18%.
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