Ici un quartet, là un trompettiste solo: un concert de jazz éphémère émerge à chaque tournant, dans les rues étroites et ensoleillées de Marciac. Ces douces notes attirent les touristes groggy par le soleil qui, en attendant les grands concerts du soir, sirotent un verre en terrasse.
"Le festival de jazz, c'est un gros chiffre au niveau de l'année", confie à l'AFP Jean-Charles Da Silva - dit "Charly" -, l'un des patrons du Central Sport café. "Ca nous permet d'être un peu plus confortable l'hiver". Idéalement situé sur la place du village, son café reçoit "six à sept fois plus de monde qu'en temps normal".
Hors festival, la petite commune compte dix café-restaurants. Mais quand débarquent les 242.000 festivaliers, c'est loin d'être suffisant. "On est nombreux à ouvrir des choses juste pendant le festival", explique Séverine Chaillou, gérante de l'éphémère bar à tapas "El Bodega".
Selon l'organisation, 60 commerces de bouche supplémentaires ouvrent durant les trois semaines de la manifestation, du 27 juillet au 15 août.
A l'année, la jeune femme tient une des 13 chambres d'hôtes de Marciac, qui est évidemment "pleine tout le festival". A tel point que "les gens réservent d'une année sur l'autre, là on a déjà des demandes pour 2019!", confie-t-elle. Cette période exceptionnelle "représente environ la moitié" de son chiffre d'affaires annuel.
"Faut pas se le cacher, c'est ce qui nous permet de vivre. On n'aurait pas le festival, on ne pourrait pas vivre" lance Mme Chaillou. Selon une enquête du cabinet-conseil Traces TPi réalisée en 2014, 56% des professionnels locaux déclarent qu'ils fermeraient leur structure si le festival devait s'arrêter.
20 millions d'euros de retombées
Si on met de côté les 35.000 personnes qui préfèrent venir à la journée, les touristes venus pour le festival privilégient les séjours longs d'environ 7 jours.
"On a développé très tôt un dispositif de chambres d'hôtes qui nous permet de faire face à l'essentiel de la demande dans un rayon de 30 km autour de Marciac", explique Jean-Louis Guilhaumon, maire de la commune. Mais il faut parfois "mobiliser le ban et l'arrière-ban du territoire" pour faire face aux besoins, concède-t-il.
Une manne pour les hôteliers - avec près de 237.700 nuitées en 2014 - et les restaurateurs. Mais aussi pour les petits producteurs locaux, puisque le shopping est le deuxième poste de dépenses de ces touristes au long-court, après la billetterie.
Sur des séjours qui coûtent en moyenne 570 euros par personne, 47% des vacanciers vont acheter des produits du terroir (charcuterie, vins de la région), pour près de 100 euros en moyenne.
Sous l'un des chapiteaux blancs de la place du village, Bernard Faure, ancien viticulteur dont le fils a repris l'exploitation, exhibe un de ses grands crus.
"Y a énormément de touristes qui viennent de France et du monde entier! On a eu des Bourguignons, une personne de Strasbourg, des Allemands et même des Asiatiques !", détaille-t-il avec son accent gersois et son béret vissé sur la tête.
Sur l'étiquette des bouteilles, la silhouette d'un contrebassiste se détache: pour l'occasion, l'AOC "Saint Mont" a sorti une bouteille spéciale "Jazz in Marciac". Pendant toute la durée du festival, "on vend environ 50.000 bouteilles de vin", annonce le moustachu.
Pour le maire, JIM constitue "un rayonnement culturel exceptionnel pour la région" avec "plus de 20 millions d'euros de retombées économiques".
Car le festival est aussi un gros générateur d'emplois, notamment pour les jeunes. Au Café de l'Hôtel de Ville, par exemple, les effectifs passent de "quatre à 15 employés". Même son de cloche à la boulangerie du coin : "On embauche trois personnes supplémentaires en temps de festival", confirme Anne Verger-Borderolle, la gérante.
Derrière les vitrines emplies de figurines de guitaristes, trompettistes et jazzmen, la fréquentation de sa boulangerie "triple" en été. "Marciac hors festival ? C'est mort !", plaisante-t-elle.
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