+ UN CHARGE DE MISSION...AVEC UNE ARME
Alexandre Benalla était "chargé de mission " à l'Elysée - comme huit autres collaborateurs actuellement. Il occupait la fonction d'adjoint au chef de cabinet, un rôle principalement organisationnel. "J'avais pour mission de préparer les déplacements du président de la République, d'organiser les grands événements, de coordonner les services qui sont nombreux au sein de la présidence", décrit M. Benalla en évoquant "quelque chose de très simple, basique".
Dédié à la protection d'Emmanuel Macron dont il est devenu proche durant la campagne, réserviste de la gendarmerie depuis 2009, M. Benalla en conservait "un tropisme pour la sécurité", dixit le général Eric Bio-Farina, qui dirige la protection du président au sein de l'Elysée. En somme, M. Benalla était "une sorte de facilitateur de la sécurité", selon le commandant militaire, sans en être "en charge". "Il ne pouvait pas intervenir dans les processus de sécurité", a-t-il martelé.
Pour autant, M. Benalla était autorisé à porter une arme car "chargé d'une mission de police", selon l'arrêté de la préfecture de police de Paris que l'AFP a pu consulter.
"J'ai été armé sur des déplacements privés" du chef de l'Etat, a expliqué M. Benalla en évoquant "un niveau de menace plus élevé" et sa "parfaite maîtrise des armes".
Pourtant "dans les déplacements non officiels, (...) la partie sécurité m'incombe à titre personnel", a affirmé le colonel Lionel Lavergne, chef du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR). Et si M. Benalla, à vélo ou sur des skis comme le montrent des photos, se trouvait "à côté du président", c'est "de manière à pouvoir jouer son rôle en tant qu'adjoint au chef de cabinet", a-t-il ajouté.
Que M. Benalla soit armé, "c'est une hérésie", tempête auprès de l'AFP un ancien membre de la chefferie de cabinet de l'Elysée. "Je suis surpris que le GSPR ait accepté. En cas de problème vous vous trouvez avec quelqu'un d'armé mais non professionnel", insiste-t-il, en s'étonnant de même de voir quasi systématiquement M. Benalla "à l'épaule" du Président lors des déplacements, à l'instar d'un officier de sécurité : "La chefferie de cabinet se trouve généralement dans un deuxième cercle".
+ RELATIONS CORDIALES OU INSULTES ?
Dirigeants du GSPR et du commandement militaire réfutent toute tension dans les relations de M. Benalla avec les services de sécurité du chef de l'Etat.
"Sur le plan opérationnel et missionnel, tout le monde appréciait les services rendus par M. Benalla, a assuré le général Bio-Farina, selon qui le chargé de mission était "unanimement apprécié" des gendarmes et policiers. Le chef du GSPR évoque lui aussi "des rapports très cordiaux" avec ses personnels, quand M. Benalla lui-même affirme avoir "beaucoup d'amis au sein du GSPR".
Si M. Benalla a admis dans son interview au Monde des "frictions", "sous forme de non-dits", les syndicats vont plus loin. Selon Fabien Vanhemelryck, secrétaire général adjoint du syndicat de gardiens de la paix, Alliance, les relations entre M. Benalla et les fonctionnaires de police sur le terrain "étaient exécrables". Selon le secrétaire général d'Unité-SGP, Yves Lefebvre, "M. Benalla faisait régner la terreur au sein du GSPR. Il allait jusqu'à l'insulte à l'égard des gradés et gardiens de la paix."
Un témoignage corroboré par un ancien officier de sécurité qui évoque un homme "menaçant", imposant "la terreur" et se permettant en déplacement de manquer de respect aux autorités locales.
+ EMPRISE ?
Simple chargé de mission, M. Benalla aurait-il pu exercer une quelconque autorité directe sur le dispositif de sécurité ?
Les syndicats policiers ont dénoncé devant le Sénat une certaine "confusion des rôles", due à "l'ambiguïté des fonctions de M. Benalla". "Les cadres de la préfecture de police le connaissaient comme une autorité", a assuré David Le Bars, secrétaire général du syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN). "Tout commissaire que vous êtes: c'est le conseiller du président de la République...", a-t-il ajouté.
Selon un ancien officier de sécurité, les patrons du GSPR "se laissaient donner des instructions" car "ils ont compris qu'Alexandre Benalla parlait directement avec le président et ils sentaient que ça pouvaient être dangereux pour eux" alors que se profilait une réforme globale de la protection du chef de l'Etat. La même source estime que certains avantages dont on a bénéficié M. Benalla - une Renault Talisman "de service" ou "de fonction", un appartement de fonction - témoigne d'un certain pouvoir, au-delà des attributs habituels d'un simple chargé de mission officieux.
Mais pour le colonel Lavergne, "il n'avait aucune autorité sur les services de sécurité. Il ne dirigeait pas le GSPR". "En aucun cas son action a pu parasiter la mienne", a confirmé le général Bio-Farina devant les députés.
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