Traduction d'une promesse de campagne d'Emmanuel Macron, le texte sur "l'encadrement de l'utilisation du téléphone portable dans les établissements d'enseignement scolaire", sur lequel députés et sénateurs avaient trouvé un compromis, a été adopté par 62 voix, contre une.
Si les LREM, MoDem, UDI-Agir-Indépendants ont soutenu cette "forme de droit à la déconnexion", LR, socialistes, Insoumis et communistes se sont abstenus devant "une opération de communication", de "l'affichage politique", "une loi de circonstance" qui "ne va rien changer".
Le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer, qui a épinglé des "contradictions" dans les arguments des oppositions, a vanté une loi "d'entrée dans le XXIème siècle" qui "envoie un message à la société française" mais aussi à l'international, avec "d'autres pays intéressés".
Cela permettra de "favoriser une rentrée scolaire plus sereine", pour la rapporteure Cathy Racon-Bouzon (LREM).
Près de neuf jeunes sur dix de 12 à 17 ans (86%) possèdent un téléphone portable en France. Or l'usage du portable perturbe la capacité d'attention en classe, le climat scolaire, réduit l'activité physique dans les cours de récréation, quand il n'expose pas des contenus violents ou pornographiques, ont insisté plusieurs défenseurs du dispositif.
Le texte interdit l'usage de tout objet connecté (portable, tablette, montre...) dans les écoles et collèges. Il y aura des exceptions "pour des usages pédagogiques" - jusqu'alors prohibés -, laissés à l'appréciation de chaque établissement dans son règlement intérieur, ou pour les enfants handicapés.
Les activités liées à l'enseignement mais à l'extérieur, comme le sport, seront aussi concernées.
Les lycées auront la possibilité, mais pas l'obligation, d'inscrire l'interdiction, totale ou partielle, du portable et autres objets connectés dans leur règlement intérieur.
Portable "intrusif" partout
Le Code de l'éducation interdit, depuis la loi du 12 juillet 2010, les portables "durant toute activité d'enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur".
A l'unisson d'autres détracteurs, Frédéric Reiss (LR) a jugé que cette loi "portée par le groupe UMP de l'époque était suffisante, en attendant une vraie loi sur le numérique à l'école, annoncée par le gouvernement".
Affirmant qu'"environ la moitié des collèges a inscrit l'interdiction du portable en classe et dans tout ou partie de la cour de récréation", Alain David (PS) s'est aussi inquiété de "problèmes logistiques et de coût" pour stocker les portables.
L'interdiction existante n'était pas effective partout et manquait d'un socle juridique solide, ont plaidé ministre et rapporteure.
"Aucun enseignant ne supporte la présence du portable en classe", a affirmé Alexis Corbière, ancien professeur, insistant sur des renforts de vie scolaire. Le défi est "le caractère intrusif du téléphone portable dans la vie de chacun", pour cet Insoumis, soulignant que "le président de la République, lorsqu'il a reçu l'équipe de France (de football) à l'Elysée, a sorti son portable et fait un selfie. Y avait-il la moindre pédagogie à l'égard des jeunes générations?"
Et "regardons-nous dans l'hémicycle", a renchéri Elsa Faucillon (PCF), pour laquelle cette loi peut aussi "donner le sentiment de ne pas faire confiance aux équipes pédagogiques".
Les chefs d'établissement, pour qui la mesure est utile mais pas un "big bang", décideront des modalités d'interdiction (lieux, conditions), le ministère prévoyant un vade-mecum.
La méconnaissance de la loi pourra entraîner la confiscation de l'appareil, permettant "d'impliquer les parents au moment de la restitution", selon Mme Racon-Bouzon.
Plaidant pour une "approche moderne des technologies" et du "discernement", le ministre a défendu une double approche, "défensive" et "offensive".
Le texte entend renforcer l'éducation à un usage "responsable et éclairé" des outils et ressources numériques. "Le progrès n'a que l'âme de celui qui s'en sert", a glissé la rapporteure, citant François Mitterrand, en 1989.
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